Dalila Dalléas Bouzar expose, "Innocente", une invitation à réinvestir nos mémoires collectives

Une toile de l'artiste (Salif D. CHEICKNA)
Une toile de l'artiste (Salif D. CHEICKNA)
Une 2ème toile (Salif D. CHEICKNA)

Dalila Dalléas Bouzar expose, "Innocente", une invitation à réinvestir nos mémoires collectives

Le 17/12/19 à 13:42
modifié 18/12/19 à 08:46
Dalila, cette "Kômian" Franco-Algérienne qui confirme l'universalité des rituels
« Dalila Dalléas Bouzar invoque les mémoires collectives ancestrales afin de réinvestir nos imaginaires d’images de femmes transfigurées par leur propres forces ». En écrivant cela pour évoquer le travail de l’artiste, l’auteur ne croyait pas si bien dire. D’ailleurs, cela vient bien à propos pour cette exposition intitulée « Innocente ». Et pour cause. Il fallait assister à la performance réalisée par Dalila pour mieux apprécier sa démarche artistique.

Début de la performance (Salif D. CHEICKNA)
Début de la performance (Salif D. CHEICKNA)



Dans l'immense cube de miroir installé dans la salle d'exposition de la galerie Cécile Fakhoury, les invités ignorent encore ce qui s'y cache. Il fallait attendre jusqu'à 19h30 mn, ce vendredi 13 décembre 2019. Lorsque le tam-tam retenti par frappes saccadées, la porte du cube s'ouvre enfin. Tellement l'impatience du public était grande. Une silhouette se trémousse. De noir vêtue. Elle captive toutes les intentions. Un silence total s'empare du public qui a constitué un demi-cercle autour du cube pour découvrir le mystère.

L'artiste en mouvement (Salif D. CHEICKNA)
L'artiste en mouvement (Salif D. CHEICKNA)



Quand Dalila hôte le voile, elle va arborer majestueusement des colliers faits de cauris. Elle met son corps en mouvement, esquisse des gestes d’une dextérité digne des pratiques rituelles. Elle regagne son cube richement décoré. Devore une tête après y avoir giclé un liquide rougeâtre, probablement du sang. Pour clore cette performance, elle se couvre d’un voile doré. C’est ce processus de libération du corps qui transparaît dans son travail qui met en évidence la femme.

Fin de la performance (Salif D. CHEICKNA)
Fin de la performance (Salif D. CHEICKNA)



Pour l’artiste, il s’agit simplement d’un moyen d’expression. Cependant dans la foule de curieux, l’on pouvait entendre : « C’est une ‘‘Kômian’’ ». Une franco-algérienne « Kômian » ? Dalila explique qu’il s’agit d’un rituel de « déplacement de corps ». « Dans ce rituel, je symbolise le corps par ce que j’ai mangé. Je le déplace en le mangeant. Avec mon corps, il disparaît et fusionne en moi. Cette transformation est symbolisée par le doré que je mets », explique Dalila.

Une 2ème toile (Salif D. CHEICKNA)
Une 2ème toile (Salif D. CHEICKNA)



Quand on lui dit que son rituel de déplacement est digne des prêtresses « Kômian », elle marque un étonnement et se demande qui sont ces prêtresses ? Dalila ne sait rien des « Kômian », ni de leur pratique. « Non je l’ai inventé », parlant de son rituel. Et d’expliquer : « Je pense que les rituels appartiennent à toute l’humanité. C’est partagé par tous. On a tous le même code. Même si un être humain décide d’inventer un rituel, quelque part, il a puisé dans des codes qui existent déjà. C’est inné en l’être humain ».

Dalila Dalléas Bouzar à la galerie Cécile Fakhoury : « Innocente », une invitation réinvestir nos mémoires collectives

Posted by Salifou Dabou on Tuesday, December 17, 2019


Le mouvement de corps que Dalila a servi dans son rituel de déplacement transparaît dans son travail. D’ailleurs pour tous ceux qui ont pris le temps de scruter ses créations l’on y découvre des séries de nus qui montrent que la réflexion de l’artiste s’articule autour de la place de la femme dans la société. Puisqu’elle en fait l’élément central de ses toiles.

A dire vrai, les toiles que le public est invité à découvrir du 13 décembre 2019 au 26 février 2020, ne sont rien d’autre qu’un prolongement de sa performance. En d’autres termes, l’on comprend mieux ses toiles après s’être approprié sa performance.

Née en 1974 à Oran en Algérie, Dalila qui est à sa 2ème exposition à la galerie Cécile Fakhoury est une artiste engagée. Elle est diplômée de l’École nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris Ses œuvres sont exposées régulièrement, notamment en France, en Algérie, et en Allemagne.

En 2005, l’on retient qu’une de ses peintures, « Scène d'amour » présentée dans le cadre de l'exposition « No Name Fever », est retirée sous la pression de menaces intégristes.

Le 17/12/19 à 13:42
modifié 18/12/19 à 08:46