
Débat sur la révision : Une Constitution n’est pas une tente dressée pour le sommeil !
A ceux-là, il est bon de rappeler la pensée de Royer Collar qui reste d’actualité. Dire qu’une Constitution n’est pas un temple dressé pour le sommeil, c’est retenir qu’une Constitution n’est pas la bible, qu’elle n’est pas une œuvre figée et qu’elle a besoin d’être actualisée.
Certes, par son rôle éminent, la Constitution constitue le socle de l’État. Fondation principale de l’édifice de l’État, elle est conçue pour durer dans le temps. Car en plus de garantir la hiérarchie des normes juridiques, elle règle, entre autres, la dévolution, l’exercice et la transmission du pouvoir.
L’édifice constitutionnel a donc vocation à demeurer longtemps dans sa structure principale. Mais à l’image de tout édifice, on en refait régulièrement les fenêtres, les portes, les couloirs, le salon, le jardin... Pierre angulaire de l’Etat, il est bon que la norme des normes s’adapte. C’est-à-dire qu’elle intègre les évolutions de la société, se polisse, se modernise et se mette en harmonie avec la cadence du pays. C’est le sens de la révision. Or justement, la cadence de la Côte d’Ivoire s’est accélérée ces dernières années. Pas toujours dans la bonne direction. Le pays a connu une succession de crises aiguës qui ont parfois mis sa loi fondamentale entre parenthèses.

Il est bon de rappeler qu'une révision constitutionnelle n’est pas à proprement parler une modification qui, elle, peut aller jusqu’à des changements substantiels. La révision, à plus forte raison, ne vise pas et n’aboutit pas à un changement de Constitution. Le 8 novembre 2016, c’était un changement de Constitution. Les Ivoiriens ont, par référendum, dit oui à l’actuelle Constitution qui a consacré la IIIe République. Votée en 2000, sous loi martiale, au lendemain du coup d’État, la loi fondamentale précédente fut par trop confligène et diviseuse.
Cette fois-ci, il ne s’agira pas de changer, mais d’ajuster. La Constitution de 2016 a elle-même prévu la procédure de sa propre révision.
Aux termes de l’article 177, « l'initiative de la révision de la Constitution appartient concurremment au Président de la République et aux membres du Parlement (...) Pour être pris en considération, le projet ou la proposition de révision doit être voté à la majorité absolue des membres du Congrès. La révision de la Constitution n'est définitive qu'après avoir été approuvée par référendum à la majorité absolue des suffrages exprimés.
Toutefois, le projet ou la proposition de révision n’est pas présenté au référendum lorsque le Président de la République décide de le soumettre au Parlement. Dans ce cas, le projet ou la proposition de révision n’est adopté que s’il réunit la majorité des deux tiers des membres du Congrès effectivement en fonction ».
Des limites infranchissables sont imposées à la révision. Ce sont, par exemple, la forme républicaine du gouvernement ou la laïcité de l’État.
C’est toujours l’image de l’édifice qui revient. On peut en réaménager les attenants, sans en bousculer la fondation principale. Et toujours cette pensée de Collar en filigrane : la Constitution n’est pas une tente dressée...