Levée des restrictions : Les maquis de Yopougon font le plein, le coronavirus rôde...
A Yopougon, la commune la plus ‘‘chaude’’ de la capitale économique, la plupart des points de beuverie ont rouvert, au grand bonheur des ‘‘aficionados’’ qui les ont pris d’assaut. Les nuits de vendredi, samedi et dimanche ont donné lieu à de véritables retrouvailles dans les maquis, au son de décibels et de pas de danse endiablés.
De Bel Air à Niangon, en passant par Nouveau-quartier, Toits-Rouges, Camp militaire, Kouté et Sideci, les Yopougonlais ont ‘‘célébré’’ dans la ferveur la reprise des activités des maquis.
Le maquis ‘‘Chine populaire’’ de Yopougon-Koweit a fait le plein le samedi 16 mai. Bon nombre de clients ont dû prendre place sur des sièges de fortune dans la périphérie. Presque personne n’arbore un cache-nez, à part quelques serveuses. A l’intérieur, la proximité et la promiscuité favorisent le contact entre les clients. « Le show nous a trop manqué. On avait besoin de se défouler un peu. Il est vrai que la maladie est encore là, mais on doit apprendre à vivre avec et à évacuer la peur », rétorque Yves Roland, un client, à la question de savoir s’il ne craint pas de choper le coronavirus en ce lieu.
Pour le jeune étudiant, « le Covid-19 n’est pas plus dangereuse que le paludisme et la tuberculose. On peut l’éviter avec un minimum de précautions. Il ne sert à rien de mettre l’économie du pays en veilleuse à cause de ce virus ».
Quid du cache-nez et de la distanciation physique?
A Kouté, le maquis ‘‘Piscine Ivoire’’, en bordure de la nouvelle voie express, a lui aussi retrouvé son ambiance des grands jours durant le weekend. La soirée de samedi a vu affluer des centaines de jeunes dans ce repère de ‘‘disciples de Bacchus’’. Port de masque, distanciation physique, lavage des mains, etc., on n’en a cure en ce lieu. Quid du coronavirus? La piste de danse est bondée.
Le public reprend en chœur les répliques des tubes en vogue. « C’est incroyable, les gens n’ont même pas conscience que le virus se propage à travers les gouttelettes de salive émises lorsqu’on parle. Ils se permettent même de chanter dans la foule. Je me demande si le gouvernement a bien fait d’autoriser la réouverture des maquis », s’indigne une vendeuse de fruits de l’autre côté du boulevard.
Hélène Kouassi, une habitante du quartier, pense, pour sa part, que les dirigeants nationaux et les autorités sanitaires ont fait ce qu’il fallait pour maintenir la Côte d’Ivoire relativement à l’abri de la pandémie du Covid-19. Il revient désormais à la population de s’approprier les messages de sensibilisation et d'adopter les bonnes pratiques. « Si les gens ne changent pas profondément de mentalité, le gouvernement ne pourra rien faire et la maladie fera davantage de victimes », avertit-elle.
Le monde, il y en avait aussi au Nakino tout le weekend. Les férus de la musique tradi-moderne n’ont pas boudé le rendez-vous de la réouverture de ce maquis de référence des rythmes bété à Yopougon Sideci. Ici aussi, point de mesures barrières de lutte contre le coronavirus. Hormis quelques serveuses et plongeurs, personne ne porte de cache-nez. « Les clients eux-mêmes ne s’en préoccupent pas », relève un disc-jockey du bar.
Quant à savoir pourquoi il ne rappelle pas, entre deux sélections musicales, les mesures de protection à l’assemblée, notre interlocuteur dit n’y avoir pas pensé. « Je vais le faire désormais. Même si je doute que les gens vont accepter de porter des masques de protection pendant qu’ils boivent et de garder au moins un mètre de distance avec leur voisin », ajoute-t-il. Avant d’ironiser en ces termes: « Ici, il y a beaucoup de couples et d’amoureux et ils sont sous l’effet de l’alcool... Si on leur demande de ne pas être proches ici, ils le seront dès qu’ils sortiront du maquis ».