Contribution/Face à la Covid-19 : Des propositions pour relancer le secteur immobilier
A l’instar des autres pays, la Côte d’Ivoire a été touchée par la Covid-19. Ainsi, au 31 mai 2020, le pays enregistrait 2833 cas confirmés dont 1435 guéris et 33 décès (Ministère de la Santé et de l’Hygiène publique République de Côte d’Ivoire). A côté de la crise sanitaire engendrée, il faut noter les effets induits de cette pandémie sur la quasi-totalité des secteurs d’activité provoquant ainsi, un ralentissement voire un dérèglement des systèmes économiques nationaux et mondiaux.
Le secteur du BTP en général et celui de l’immobilier en particulier, pourvoyeur d’emplois et grand contributeur à la formation du produit intérieur brut subissent de plein fouet les contrecoups de cette pandémie.
Pour rappel, les secteurs du BTP et de l’immobilier représentent environ 6,8% du PIB ivoirien et génèrent chaque année autour de 28 000 emplois. L’immobilier vient juste après le commerce et l’industrie manufacturière en termes de création d’emplois. Son importance dans l’économie nationale est également caractérisée par son fort dynamisme qui connait l’une des plus fortes croissances sectorielles, autour de 26% entre 2012 et 2018. Le chiffre d’affaires de l’immobilier a quadruplé sur la même période, passant de 405 milliards à 1.562 milliards de francs CFA.
Comment la Covid-19 affecte –t-elle le marché de l’immobilier de rapport résidentiel ou professionnel ?
Pour répondre à cette question, KODANN a rencontré différents acteurs de l’immobilier dans les communes de Yopougon, Cocody et de la zone portuaire à savoir des bailleurs, preneurs (locataires), promoteurs immobiliers, agents immobiliers, et des acteurs portuaires pour recueillir leurs avis sur les effets économiques de cette maladie.
Au niveau résidentielA Cocody, suivant les dires des agents immobiliers rencontrés, ils gèrent au cas par cas c’est-à-dire suivant la situation économique du preneur. Par exemple, certains mandants acceptent le fait que leurs agents immobiliers fassent des aménagements en termes de révision à la baisse du loyer ou appliquent effectivement un moratoire si le locataire arrive toutefois à prouver qu’il a été fragilisé économiquement par les effets de la Covid-19. Fragilité liée au fait qu’il est soit en chômage technique soit au fait que ses affaires sont momentanément à l’arrêt.
Au niveau de la promotion immobilière, les effets de la crise sont très visibles car la plupart des chantiers sont à l’arrêt. Les raisons invoquées sont de quatre ordres principalement ; les horaires du couvre-feu d’alors en vigueur par rapport aux horaires de descente des ouvriers, la rareté des clients dans les agences de vente, la circonspection des banques dans la mise en place des facilités de crédit, la faiblesse du recouvrement pour l’autofinancement. La conjonction de ces facteurs a eu pour conséquence que bon nombre de promoteurs connaissent un arrêt ou subissent une baisse d’activité de plus de 75%.
Au niveau du secteur de l’immobilier logistique selon les acteurs portuaires rencontrés, l’immobilier logistique a plus ou moins résisté aux effets de la Covid-19 grâce aux mesures prises par les autorités portuaires.
Une série de mesures a été prise allant de l’application de certaines exonérations portant sur les surestaries conteneur au rallongement des délais de franchise pour soulager les opérateurs économiques et en même temps éviter la congestion des aires de stockage.
Le volume du fret à l’Import n’a pas véritablement été touché sur la période février-avril. C’est plutôt à l’Export qu’on pourrait noter une relative baisse du fait que l’Europe et l’Asie restent des destinations principales pour nos matières premières. Du coup, une optimisation des aires d’entreposage a été effectuée au niveau du port pour juguler la diminution de la fréquence de rotation des camions qui faisaient la navette entre la zone portuaire et la zone hors portuaire.
Les perspectives de l’après COVID-19
La capacité de rebond va dépendre de la faculté de la Côte d'Ivoire à mettre en œuvre efficacement son plan de riposte.
Ce plan que nous souhaitons inclusif pourrait s’enrichir des propositions faites par les différentes parties prenantes du marché de l’immobilier avec qui nous avons mené ces interviews.
Propositions faites au niveau résidentiel et tertiaire :
- Exonérer partiellement les bailleurs en ce qui concerne l’impôt foncier,
- Accélérer la délivrance des titres de propriété afin de permettre aux propriétaires fonciers de prendre des prêts bancaires pour relancer leurs activités immobilières ;
- Bonifier le taux d’intérêt des prêts immobiliers pour faciliter les travaux de rénovation ou de constructions nouvelles.
- Accompagner financièrement les projets immobiliers en cours de réalisation et en fonction du niveau d’avancement pour résorber le retard ;
- Rendre effective la réalisation de VRD primaires par l’Etat de Côte d’Ivoire
Boulangerie | Boutique | Imprimerie | Supérette | Débits de Boisson | Mobile Money | |
Nbre d’employés en chômage technique | 4/12 | 0/2 | 9/10 | 2/4 | 10/15 | 0/2 |
Variation du chiffre d’affaires Février-Avril 2020 | -60% | -65% | -90% | -25% | -70% | -75% |
L’analyse des données de ce tableau nous donne un aperçu de la triste réalité que vivent les opérateurs économiques dans cette situation de crise sanitaire.
Sur les 6 TPEs visitées qui emploient en temps normal 45 personnes, ce sont au total 25 employés qui ont fait l’objet de mise en chômage technique ; soit une moyenne de 55%. En termes de chiffre d’affaires, c’est une baisse moyenne de 65% que ces TPEs ont subie sur la période mars-avril.
Par Kassoum K. COULIBALY, Directeur général de KODANN (Cabinet Expertise & Conseil en immobilier)