Burundi / Décès de Pierre Nkurunziza: Le pays perd son président footballeur






Le président de la République et le...
Le président de la République et le...
Le président de la République et le...

Burundi / Décès de Pierre Nkurunziza: Le pays perd son président footballeur

Le 10/06/20 à 12:07
modifié 10/06/20 à 12:08
Son histoire se résume en deux mots : la guerre et le foot. Les armes l’ont amené aux portes du pouvoir (conquis par la suite par les urnes) et le football, un domaine où ses quinze ans de pouvoir ont eu un bilan réel.

Pierre Nkurunziza est mort hier à l’hôpital du Cinquantenaire de Karuzi, une ville au centre-est du Burundi. Il avait 55 ans et s’apprêtait à rendre le pouvoir en août prochain. Et ce, après trois mandats émaillé de graves incidents. Sa mort que beaucoup ont lié au coronavirus a été officiellement attribué à une crise cardiaque. « Le gouvernement de la République du Burundi annonce avec une très grande tristesse le décès inopiné de Son Excellence Pierre Nkurunziza, Président de la République du Burundi, survenu à l’Hôpital du Cinquantenaire de Karusi suite à un arrêt cardiaque ce 8 juin 2020», a indiqué le gouvernement burundais sur Twitter.

Pierre Nkurunziza, au pouvoir depuis 2005, avait surpris en annonçant en juin 2018 qu’il ne se présenterait pas à sa succession en 2020, alors que la nouvelle Constitution modifiée par référendum le lui permettait.

Né de parents hutu et tutsi,

il rejoint la rébellion

contre les tutsi

Né d’un père hutu et d’une mère tutsi, Pierre Nkurunziza bascule dans la violence lorsque son père fut assassiné par les tutsi et que lui-même faillit y passer. Il rejoint alors la lutte armée hutu et finit par en assurer la direction. Nkurunziza va, en effet, diriger le principal groupe armé hutu pendant la guerre civile burundaise.

Après une dizaine d’années passées dans la rébellion, il ‘’entre ‘’dans la République en devenant ministre d’Etat, ministre de la bonne gouvernance et de l’inspection générale de l’État en 2003. Deux ans plus tard, il devient président de la République. Que retenir de ces années de règne ? Un règne dans le sangPour l’opposition, il n’y a point de bilan. Elle qualifie Pierre Nkurunziza de président qui n’a jamais pris le temps de s’occuper des «affaires sérieuses» du pays. Pour preuve, elle brandit le taux de pauvreté. Au Burundi, 70% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté. Pour les opposants, dont de nombreux militants ont été tués ou pourchassés hors du pays, le Burundi a vécu une page noire sous Nkurunziza.

Dans ce petit pays d’Afrique de l’Est, voisin et presque jumeau du Rwanda, la guerre a laissé beaucoup de traces. Marqué lui-même, alors qu’il n’avait que 8 ans, par le massacre de 200 000 hutus dont son père en 1972, Nkurunziza, n’a pas réussi à arrêter l’effusion de sang.

Épuration ethnique de l’armée, opposants réduits au silence et modification de la Constitution pour faire sauter la limite des mandats présidentiels : le régime burundais s’est enfoncé dans la violence répétée.Le football et DieuS’il y a un président qui aime le ballon rond, c’est bien Pierre Nkurunziza. Ses frères d’armes témoignent que pendant la rébellion, il avait installé un terrain de foot en pleine forêt. Arrivé au pouvoir, il va créer des stades presque dans toutes les grandes villes du pays. Ancien professeur de sport à l’Institut d’éducation physique et sport du Burundi, ex-joueur de deuxième division burundaise, le président avait son équipe, le Haleluya FC. Plusieurs fois par semaine, il se rendait aux entraînements.

L’anecdote de joueurs arrêtés pour avoir taclé le président

Sa réputation de fou du foot, Pierre Nkurunziza l’a acquise après un match qui a vu l’arrestation de deux adversaires et de leurs dirigeants, poursuivis en justice pour attentat à la sureté de l’État. Qu’ont-ils fait ? Deux des mis en cause, les joueurs, avaient au cour du match taclé le président alors que ce dernier filait droit au but. Ces deux joueurs, des réfugiés congolais, ne savaient pas que l’attaquant qui menaçait de marquer était le président de la République et qu’il était interdit de l’attaquer quand il avait la balle. Ils l’ont donc stoppé par un banal tacle...

Membre d’une chorale

chrétienne

Pendant que Pierre Nkurunziza usait des armes pour arriver au pouvoir, son épouse, Denise Bucumi Nkurunziza, très portée sur le spirituel, faisait le tour des églises évangéliques.

Une fois au pouvoir, le couple va renforcer sa présence dans les lieux de culte et Nkurunziza intégrera une chorale avec laquelle il effectuera même ses visites officielles.

Il devrait remettre le pouvoir

en août prochainOn n’y croyait pas mais finalement Pierre Nkurunziza a driblé tout le monde en annonçant son retrait du pouvoir et sa non participation aux dernières élections. De fait, tout laissait croire que l’ancien rebelle voulait s’éterniser au pouvoir. Quand il termine ses deux mandats constitutionnels en 2013, il force et obtient un troisième mandat après une première modification de la Constitution. Vers la fin du troisième mandat, il opère encore une modification constitutionnelle. Cette fois pour porter le mandat présidentiel de cinq à sept ans. Ce qui lui permettrait de rester aux commandes jusqu’en 2034. Mais malgré ces modifications qui ont coûté de nombreuses vies (dans la répression sanglante des manifestations de protestation), Pierre Nkurunziza n’est pas allé pour une quatrième fois aux urnes. Ce qui a permis au général Major Évariste Ndayishimiye, candidat de son parti, de l’emporter.



Le 10/06/20 à 12:07
modifié 10/06/20 à 12:08