Kadjo Alphonse, Expert en finance et inclusion financière: "L’innovation technologique offre des perspectives meilleures pour les petites entreprises"
Le spécialiste en inclusion financière explique les avantages de l'innovation technologique et il invite les populations à utiliser les circuits formels de la finance digitale.
L’innovation technologique prend de l’ampleur dans tous les secteurs d’activités, notamment au niveau de la finance. Pouvez-vous nous dresser un état des lieux des transformations du secteur financier générées par les nouvelles technologies ?
L'innovation technologique a profondément bouleversé le secteur bancaire et financier, touchant aussi bien les services aux clients, c’est-à-dire les personnes physiques et les entreprises que les opérations internes des institutions financières. On peut énumérer, de façon générale, quelques principales transformations occasionnées par l’innovation technologique. Les entreprises Fintech, qui sont des starts up utilisant l’innovation technologique dans le domaine financier, ont transformé les services traditionnels en offrant des solutions plus rapides, moins chères et accessibles via des plateformes numériques. Cela inclut les paiements, les transferts, le crédit, les assurances et les placements. Il y a des applications mobiles permettent aux utilisateurs de gérer leurs comptes bancaires, d’effectuer des opérations et de souscrire à des services financiers sans avoir besoin de se rendre dans une agence physique.
En Côte d’Ivoire, les banques et les institutions financières avaient vu ces nouveaux acteurs, les opérateurs de télécommunication, comme une menace...
Tout à fait, mais avec le développement rapide des innovations technologiques, ils ont compris l’impérieuse nécessité de prendre le train en marche, de s’ajuster et s’adapter. Ainsi ces institutions financières ont, soit fait progresser leur expérience technologique propre, soit noué des partenariats avec les Fintech et opérateurs de télécommunication. Ainsi avec l’arrivée dans l’écosystème financier de ces nouveaux acteurs, les institutions financières traditionnels ont décidé de faire leur mue et de s’embarquer dans la transformation digitale avec plus ou moins de succès.
Justement, quel est l’impact réel de ces transformations sur le secteur informel qui concentre une grande partie des Petites entreprise ?
Les transformations technologiques dans le secteur financier ont eu des impacts significatifs sur les populations à travers le monde, avec des répercussions particulières sur le secteur informel, qui concentre une grande partie des travailleurs et des petites entreprises, notamment dans les économies en développement. Grâce aux technologies telles que la banque mobile, les paiements numériques et les portefeuilles électroniques, des millions de personnes autrefois exclues des systèmes bancaires traditionnels ont désormais accès à des services financiers. Les plateformes de financement participatif (crowdfunding) et les services de microcrédit numériques ont facilité l'accès au crédit pour les petites entreprises informelles, souvent non éligibles aux prêts traditionnels. Cela permet de soutenir l'entrepreneuriat et d'améliorer la résilience économique des travailleurs du secteur informel. Les innovations comme les paiements mobiles et électroniques réduisent les coûts et les délais des transactions pour les travailleurs du secteur informel. Ceux-ci peuvent désormais recevoir des paiements en temps réel, gérer leurs finances sans devoir se rendre dans une banque, et éviter les coûts élevés associés aux envois d’argent via des intermédiaires traditionnels. Pour les petites entreprises du secteur informel, la capacité à accepter des paiements via des applications mobiles permet de réduire la dépendance à l'argent liquide, ce qui limite les risques de vol ou de pertes et améliore la traçabilité des flux financiers.
Malgré ce boom des innovations technologiques, le taux de bancarisation reste relativement bas en Côte d’Ivoire estimé à 30%, comparativement aux pays émergents. Qu’est-ce qui explique cela ?
En 2012, le taux de bancarisation stricte était de 16% en Côte d’Ivoire, 13% dans la zone Uemoa. A fin 2022, le taux de bancarisation stricte est passé à 30% en Côte d’Ivoire et à 24% dans la zone Uemoa, alors que le taux de bancarisation est estimé à 99% en France, 95% aux Usa et 80-90% en Chine. Le constat est réel, le taux de bancarisation est encore bas en Côte d’Ivoire, malgré la tendance haussière observée sur la période depuis 2012. Une grande partie de la population n'est toujours pas intégrée au système bancaire traditionnel.
Quels sont les facteurs qui expliquent cela ?
Une grande partie de la population ivoirienne opère dans le secteur informel, qui représente environ 80% de l’économie. Les travailleurs informels sont souvent exclus du système bancaire traditionnel, car ils ne disposent pas des documents formels nécessaires pour ouvrir un compte bancaire ou accéder aux services financiers formels. Les banques faisant appel à l’épargne publique sont soumises à une réglementation stricte et leurs activités sont encadrées sous la supervision des autorités monétaires de l’Umoa. Ainsi la documentation requise et les procédures et vérifications pour l’ouverture d’un compte sont vécues par les populations comme un parcours du combattant et freinent ainsi les recours aux comptes bancaires classiques. Les conditions liées à l’ouverture et les frais de gestion d’un compte bancaire en Côte d'Ivoire sont souvent considérés comme élevés par une grande partie de la population à faibles revenus. Cela dissuade de nombreuses personnes d'ouvrir un compte, même si elles utilisent des téléphones mobiles. En plus les infrastructures bancaires restent concentrées dans les grandes villes comme Abidjan. En milieu rural, les agences bancaires sont peu nombreuses, et l’accès aux services financiers est donc limité.
Comment sensibiliser davantage les populations à capter les nombreuses opportunités qu’offre l’innovation technologique notamment la finance digitale ?
La sensibilisation des populations à l’usage des moyens de paiement électronique nécessite une approche multiforme, combinant l’éducation financière, la communication ciblée et la mise en place d’infrastructures accessibles et adaptées. Pour y arriver, il faut adapter les messages de sensibilisation aux spécificités culturelles et linguistiques des différentes régions du pays. Il faut utiliser des langues locales et des exemples concrets de la vie quotidienne pour montrer comment les moyens de paiement électronique peuvent répondre aux besoins spécifiques des populations et comment se prémunir des risques liés à leur utilisation. L’intégration de l’éducation financière dans le système scolaire permet de sensibiliser les jeunes générations dès leur plus jeune âge. Par exemple, au Canada, l’utilisation de la carte de crédit qui est l’outil de transaction le plus utilisé, est expliquée aux jeunes dès le bas âge.
Malgré tout, bon nombre continuent d’utiliser les mécanismes financiers informels. Qu’est-ce que vous préconisez ?
Pour encourager les populations à adopter et à utiliser régulièrement les circuits formels de la finance digitale, plusieurs mesures peuvent être mises en œuvre. Les institutions financières et Sfd, doivent proposer des produits simples, flexibles et abordables, adaptés aux réalités économiques des populations, notamment celles travaillant dans le secteur informel. Des comptes à faible coût de maintenance, des frais et commissions revues à la baisse, des services améliorés de micro-épargne, des micro-prêts, ou des solutions de micro-assurance peuvent répondre à ces besoins. Il faut assurer une disponibilité des services financiers digitaux en milieu rural ou dans les zones à faibles revenus, via des agents de mobile money ou des terminaux de paiement mobile. Cela réduit la dépendance aux agences bancaires physiques, souvent inaccessibles. Il faut renforcer la sécurité des transactions financières digitales pour réduire la méfiance liée aux risques de fraude ou de perte de fonds. Les populations doivent être assurées que les transactions via des moyens formels sont sécurisées. Il faut également encourager les petites entreprises et les travailleurs du secteur informel à formaliser leurs activités en leur facilitant l’accès à des solutions de paiement numérique et en leur offrant des avantages tangibles, comme des facilités fiscales ou des prêts à des conditions préférentielles. Cela pourrait passer par des incitations fiscales ou des programmes d’accompagnement.
N'est-il pas nécessaire que les opérateurs de services financiers digitaux devraient se préoccuper davantage des demandes des populations plutôt que d’accroître des offres ?
Absolument d’accord. L’approche conseillée est de toujours partir d’abord des demandes, attentes et besoins des clients, utilisateurs et partant de la population.
Comment connaître ces attentes et besoins ?
Très simple : leur demander. Poser la question aux clients et utilisateurs. Ensuite munis des données, il faut tirer des informations qui permettront de concevoir ou d’adapter les offres en produits et services qui répondent mieux aux attentes, besoins et demandes des populations. Et non l’inverse. Les opérateurs de services financiers digitaux gagneraient donc à se concentrer davantage sur les demandes, attentes et besoins des populations. En effet, le succès à long terme des services financiers digitaux repose sur leur adéquation avec les besoins réels des utilisateurs.
Si les bénéfices de l’innovation technologique dans la finance sont certains pour les populations comme pour les entreprises, il reste encore des défis, comme la protection des données des consommateurs. Comment y répondre ?
La mise en place de cadres législatifs solides pour la protection des données personnelles est essentielle. En Côte d'Ivoire, la loi sur la protection des données personnelles existe (loi n° 2013-450 du 19 juin 2013), mais son application doit être renforcée pour garantir que les acteurs concernés respectent les normes en matière de confidentialité des données. L’Artci, en tant qu’Autorité de Régulation des Télécommunications, y veille au niveau de tous les acteurs de l’écosystème financiers et télécommunications, et n’hésite pas, lors des contrôles et vérifications, à prendre des sanctions contre les fauteurs. C’est clair, les différents acteurs concernés doivent se conformer à la loi en la matière. En ce qui concerne la sécurité des transactions, comme indiqué précédemment, les autorités de supervision des Banques, institutions financières et Fintech mettent l’accent sur la mise en place par ceux-ci, d’infrastructures informatiques et technologiques robustes capables de détecter les intrusions et fraudes, et conforter ainsi la cybersécurité des solutions et produits déployés. Cette exigence fait partie du dossier de demande d’agrément, est soumise à reporting aux autorités monétaires, et fait l’objet d’attention particulière lors des vérifications périodiques. Le défaut de conformité expose les contrevenants à des sanctions administratives et pécuniaires. Par ailleurs, il est crucial de mettre en œuvre des technologies de cryptage des données sensibles pour garantir que les informations financières des consommateurs ne soient pas compromises lors des transactions. Vu qu’un volume croissant de transactions se font via des smartphones en Côte d’Ivoire, les applications de mobile money et les services bancaires mobiles doivent être conçus avec des protocoles de sécurité robustes. Une des premières lignes de défense pour garantir la sécurité des données des consommateurs est la sensibilisation. Les populations doivent donc être informées des bonnes pratiques en matière de sécurité numérique, telles que la création de mots de passe robustes, l’évitement de l'utilisation de réseaux Wi-Fi publics pour des transactions financières, ou encore la vigilance face aux tentatives de phishing.
Quelles sont les perspectives de l’innovation technologique pour la Côte d’Ivoire ?
L’innovation technologique offre de nombreuses opportunités pour la Côte d’Ivoire, et les perspectives sont prometteuses dans plusieurs secteurs de l’économie. Notamment, l’agriculture, le e-commerce. Avec la croissance continue des services de mobile money et l'émergence de nouvelles Fintech, la Côte d'Ivoire devrait connaître une expansion significative de l'inclusion financière, touchant des millions de personnes encore exclues du système bancaire traditionnel. Les innovations comme les prêts numériques, les assurances mobiles, ou encore les services de micro-épargne adaptés aux travailleurs du secteur informel vont continuer à se développer. L’AgriTech est une autre opportunité clé pour l’innovation en Côte d’Ivoire. Des plateformes digitales peuvent aider les agriculteurs à accéder à des financements, des assurances et des informations météorologiques en temps réel pour améliorer leur productivité. En 2020, des initiatives comme la blockchain pour la traçabilité du cacao ont déjà été testées. Cette technologie pourrait s'étendre à d'autres secteurs agricoles, renforçant la transparence et l'efficacité des chaînes d'approvisionnement. Le commerce électronique en Côte d’Ivoire est en plein essor, soutenu par les innovations dans les systèmes de paiement digital et l'augmentation de l'utilisation des smartphones.
En Côte d’Ivoire, les banques et les institutions financières avaient vu ces nouveaux acteurs, les opérateurs de télécommunication, comme une menace...
Tout à fait, mais avec le développement rapide des innovations technologiques, ils ont compris l’impérieuse nécessité de prendre le train en marche, de s’ajuster et s’adapter. Ainsi ces institutions financières ont, soit fait progresser leur expérience technologique propre, soit noué des partenariats avec les Fintech et opérateurs de télécommunication. Ainsi avec l’arrivée dans l’écosystème financier de ces nouveaux acteurs, les institutions financières traditionnels ont décidé de faire leur mue et de s’embarquer dans la transformation digitale avec plus ou moins de succès.
Justement, quel est l’impact réel de ces transformations sur le secteur informel qui concentre une grande partie des Petites entreprise ?
Les transformations technologiques dans le secteur financier ont eu des impacts significatifs sur les populations à travers le monde, avec des répercussions particulières sur le secteur informel, qui concentre une grande partie des travailleurs et des petites entreprises, notamment dans les économies en développement. Grâce aux technologies telles que la banque mobile, les paiements numériques et les portefeuilles électroniques, des millions de personnes autrefois exclues des systèmes bancaires traditionnels ont désormais accès à des services financiers. Les plateformes de financement participatif (crowdfunding) et les services de microcrédit numériques ont facilité l'accès au crédit pour les petites entreprises informelles, souvent non éligibles aux prêts traditionnels. Cela permet de soutenir l'entrepreneuriat et d'améliorer la résilience économique des travailleurs du secteur informel. Les innovations comme les paiements mobiles et électroniques réduisent les coûts et les délais des transactions pour les travailleurs du secteur informel. Ceux-ci peuvent désormais recevoir des paiements en temps réel, gérer leurs finances sans devoir se rendre dans une banque, et éviter les coûts élevés associés aux envois d’argent via des intermédiaires traditionnels. Pour les petites entreprises du secteur informel, la capacité à accepter des paiements via des applications mobiles permet de réduire la dépendance à l'argent liquide, ce qui limite les risques de vol ou de pertes et améliore la traçabilité des flux financiers.
Malgré ce boom des innovations technologiques, le taux de bancarisation reste relativement bas en Côte d’Ivoire estimé à 30%, comparativement aux pays émergents. Qu’est-ce qui explique cela ?
En 2012, le taux de bancarisation stricte était de 16% en Côte d’Ivoire, 13% dans la zone Uemoa. A fin 2022, le taux de bancarisation stricte est passé à 30% en Côte d’Ivoire et à 24% dans la zone Uemoa, alors que le taux de bancarisation est estimé à 99% en France, 95% aux Usa et 80-90% en Chine. Le constat est réel, le taux de bancarisation est encore bas en Côte d’Ivoire, malgré la tendance haussière observée sur la période depuis 2012. Une grande partie de la population n'est toujours pas intégrée au système bancaire traditionnel.
Quels sont les facteurs qui expliquent cela ?
Une grande partie de la population ivoirienne opère dans le secteur informel, qui représente environ 80% de l’économie. Les travailleurs informels sont souvent exclus du système bancaire traditionnel, car ils ne disposent pas des documents formels nécessaires pour ouvrir un compte bancaire ou accéder aux services financiers formels. Les banques faisant appel à l’épargne publique sont soumises à une réglementation stricte et leurs activités sont encadrées sous la supervision des autorités monétaires de l’Umoa. Ainsi la documentation requise et les procédures et vérifications pour l’ouverture d’un compte sont vécues par les populations comme un parcours du combattant et freinent ainsi les recours aux comptes bancaires classiques. Les conditions liées à l’ouverture et les frais de gestion d’un compte bancaire en Côte d'Ivoire sont souvent considérés comme élevés par une grande partie de la population à faibles revenus. Cela dissuade de nombreuses personnes d'ouvrir un compte, même si elles utilisent des téléphones mobiles. En plus les infrastructures bancaires restent concentrées dans les grandes villes comme Abidjan. En milieu rural, les agences bancaires sont peu nombreuses, et l’accès aux services financiers est donc limité.
Comment sensibiliser davantage les populations à capter les nombreuses opportunités qu’offre l’innovation technologique notamment la finance digitale ?
La sensibilisation des populations à l’usage des moyens de paiement électronique nécessite une approche multiforme, combinant l’éducation financière, la communication ciblée et la mise en place d’infrastructures accessibles et adaptées. Pour y arriver, il faut adapter les messages de sensibilisation aux spécificités culturelles et linguistiques des différentes régions du pays. Il faut utiliser des langues locales et des exemples concrets de la vie quotidienne pour montrer comment les moyens de paiement électronique peuvent répondre aux besoins spécifiques des populations et comment se prémunir des risques liés à leur utilisation. L’intégration de l’éducation financière dans le système scolaire permet de sensibiliser les jeunes générations dès leur plus jeune âge. Par exemple, au Canada, l’utilisation de la carte de crédit qui est l’outil de transaction le plus utilisé, est expliquée aux jeunes dès le bas âge.
Malgré tout, bon nombre continuent d’utiliser les mécanismes financiers informels. Qu’est-ce que vous préconisez ?
Pour encourager les populations à adopter et à utiliser régulièrement les circuits formels de la finance digitale, plusieurs mesures peuvent être mises en œuvre. Les institutions financières et Sfd, doivent proposer des produits simples, flexibles et abordables, adaptés aux réalités économiques des populations, notamment celles travaillant dans le secteur informel. Des comptes à faible coût de maintenance, des frais et commissions revues à la baisse, des services améliorés de micro-épargne, des micro-prêts, ou des solutions de micro-assurance peuvent répondre à ces besoins. Il faut assurer une disponibilité des services financiers digitaux en milieu rural ou dans les zones à faibles revenus, via des agents de mobile money ou des terminaux de paiement mobile. Cela réduit la dépendance aux agences bancaires physiques, souvent inaccessibles. Il faut renforcer la sécurité des transactions financières digitales pour réduire la méfiance liée aux risques de fraude ou de perte de fonds. Les populations doivent être assurées que les transactions via des moyens formels sont sécurisées. Il faut également encourager les petites entreprises et les travailleurs du secteur informel à formaliser leurs activités en leur facilitant l’accès à des solutions de paiement numérique et en leur offrant des avantages tangibles, comme des facilités fiscales ou des prêts à des conditions préférentielles. Cela pourrait passer par des incitations fiscales ou des programmes d’accompagnement.
N'est-il pas nécessaire que les opérateurs de services financiers digitaux devraient se préoccuper davantage des demandes des populations plutôt que d’accroître des offres ?
Absolument d’accord. L’approche conseillée est de toujours partir d’abord des demandes, attentes et besoins des clients, utilisateurs et partant de la population.
Comment connaître ces attentes et besoins ?
Très simple : leur demander. Poser la question aux clients et utilisateurs. Ensuite munis des données, il faut tirer des informations qui permettront de concevoir ou d’adapter les offres en produits et services qui répondent mieux aux attentes, besoins et demandes des populations. Et non l’inverse. Les opérateurs de services financiers digitaux gagneraient donc à se concentrer davantage sur les demandes, attentes et besoins des populations. En effet, le succès à long terme des services financiers digitaux repose sur leur adéquation avec les besoins réels des utilisateurs.
Si les bénéfices de l’innovation technologique dans la finance sont certains pour les populations comme pour les entreprises, il reste encore des défis, comme la protection des données des consommateurs. Comment y répondre ?
La mise en place de cadres législatifs solides pour la protection des données personnelles est essentielle. En Côte d'Ivoire, la loi sur la protection des données personnelles existe (loi n° 2013-450 du 19 juin 2013), mais son application doit être renforcée pour garantir que les acteurs concernés respectent les normes en matière de confidentialité des données. L’Artci, en tant qu’Autorité de Régulation des Télécommunications, y veille au niveau de tous les acteurs de l’écosystème financiers et télécommunications, et n’hésite pas, lors des contrôles et vérifications, à prendre des sanctions contre les fauteurs. C’est clair, les différents acteurs concernés doivent se conformer à la loi en la matière. En ce qui concerne la sécurité des transactions, comme indiqué précédemment, les autorités de supervision des Banques, institutions financières et Fintech mettent l’accent sur la mise en place par ceux-ci, d’infrastructures informatiques et technologiques robustes capables de détecter les intrusions et fraudes, et conforter ainsi la cybersécurité des solutions et produits déployés. Cette exigence fait partie du dossier de demande d’agrément, est soumise à reporting aux autorités monétaires, et fait l’objet d’attention particulière lors des vérifications périodiques. Le défaut de conformité expose les contrevenants à des sanctions administratives et pécuniaires. Par ailleurs, il est crucial de mettre en œuvre des technologies de cryptage des données sensibles pour garantir que les informations financières des consommateurs ne soient pas compromises lors des transactions. Vu qu’un volume croissant de transactions se font via des smartphones en Côte d’Ivoire, les applications de mobile money et les services bancaires mobiles doivent être conçus avec des protocoles de sécurité robustes. Une des premières lignes de défense pour garantir la sécurité des données des consommateurs est la sensibilisation. Les populations doivent donc être informées des bonnes pratiques en matière de sécurité numérique, telles que la création de mots de passe robustes, l’évitement de l'utilisation de réseaux Wi-Fi publics pour des transactions financières, ou encore la vigilance face aux tentatives de phishing.
Quelles sont les perspectives de l’innovation technologique pour la Côte d’Ivoire ?
L’innovation technologique offre de nombreuses opportunités pour la Côte d’Ivoire, et les perspectives sont prometteuses dans plusieurs secteurs de l’économie. Notamment, l’agriculture, le e-commerce. Avec la croissance continue des services de mobile money et l'émergence de nouvelles Fintech, la Côte d'Ivoire devrait connaître une expansion significative de l'inclusion financière, touchant des millions de personnes encore exclues du système bancaire traditionnel. Les innovations comme les prêts numériques, les assurances mobiles, ou encore les services de micro-épargne adaptés aux travailleurs du secteur informel vont continuer à se développer. L’AgriTech est une autre opportunité clé pour l’innovation en Côte d’Ivoire. Des plateformes digitales peuvent aider les agriculteurs à accéder à des financements, des assurances et des informations météorologiques en temps réel pour améliorer leur productivité. En 2020, des initiatives comme la blockchain pour la traçabilité du cacao ont déjà été testées. Cette technologie pourrait s'étendre à d'autres secteurs agricoles, renforçant la transparence et l'efficacité des chaînes d'approvisionnement. Le commerce électronique en Côte d’Ivoire est en plein essor, soutenu par les innovations dans les systèmes de paiement digital et l'augmentation de l'utilisation des smartphones.