Recherche COVID-19: Une étude révèle les impacts multisectoriels sur les populations en Côte d'Ivoire et au Burkina Faso

Traitement d'un patient atteint du Covid-19. (DR)
Traitement d'un patient atteint du Covid-19. (DR)
Traitement d'un patient atteint du Covid-19. (DR)

Recherche COVID-19: Une étude révèle les impacts multisectoriels sur les populations en Côte d'Ivoire et au Burkina Faso

En Côte d’Ivoire, les cas de COVID-19 ont quintuplé au cours des deux derniers mois, principalement dans le Grand Abidjan. La Côte d’Ivoire est également affectée par la saison des pluies, les glissements de terrain et les inondations, ce qui intensifie la crise dans des zones exposées à la COVID-19. Au Burkina Faso, l'épidémie de la COVID-19 a exacerbé un contexte sécuritaire déjà dégradé dans le pays. Plus de 921 000 personnes ont été déracinées de leurs maisons et deux millions dépendent de l'aide[1].

IPA a développé l’enquête RECOVR[2] pour comprendre les effets de la COVID-19 sur les populations et permettre une réponse politique basée sur des preuves scientifiques. Nous avons collaboré avec les deux Ministères de l’Emploi, le Ministère de l’Education ivoirien et l’agence Development Media International (DMI). L’enquête en Côte d’Ivoire, menée du 6 au 26 juin 2020, a atteint 1 356 répondants; l'enquête au Burkina Faso, menée du 1er au 15 juin 2020, en a atteint 1 329. L'enquête en Côte d'Ivoire a été menée à partir d'un échantillon aléatoire de l'Enquête régionale intégrée sur l'emploi et dans le secteur informel 2017, tandis que l'enquête au Burkina Faso a été menée à l'aide de la numérotation aléatoire d'une base de données représentative au niveau national.

Une majorité de répondants ont adopté des comportements préventifs et ne se sentent pas à risque de contracter le COVID-19. En Côte d’Ivoire, 41% des interrogés se sentent exposées au risque de contracter la COVID-19. Au Burkina Faso, 39% se sentent à risque, ceux qui ne ressentent pas ce risque le justifient par les mesures préventives - en effet, 89% portent un masque en public. L'adoption de comportements préventifs peut être difficile au Burkina Faso, pays touché par l'escalade de la violence et où 350 000 personnes[3] sont désormais sans abri adéquat.

Sur le plan de la santé, une petite proportion de répondants ont retardé ou sauté des rendez-vous médicaux de routine en Côte d’Ivoire (14%) et au Burkina Faso (8,4%). Les raisons invoquées étaient toutefois différentes : alors qu'en Côte d'Ivoire, une majorité de répondants citaient le coût comme raison, au Burkina Faso, ils citent de longs délais d'attente ou des cliniques en sous-effectif. La crise humanitaire au Burkina Faso a gravement compromis l'infrastructure sanitaire du pays, où près de 300 établissements[4] de santé ont été fermés, d'autres fonctionnant au minimum.

La majorité des enquêtés sont sans emploi, surtout en Côte d’Ivoire. Près de la moitié de l’échantillon de la Côte d’Ivoire a perdu son emploi depuis février, en particulier dans le secteur informel[5]. Alors que 67% ont travaillé en février, 20% déclarent que leur entreprise est désormais fermée. Parmi les entreprises comptant plus d'un employé, 65% les répondants gagnent moins et 35% ont vu leurs heures diminuer

Une tendance similaire existe au Burkina Faso, bien que la baisse soit plus faible, avec 40% des répondants travaillant la semaine dernière contre 60% en février, 61% des personnes encore en activité gagnant moins et 57% travaillant moins d'heures. En réponse, le gouvernement soutient les services publics, via notamment des transferts, des subventions et la suppression des pénalités pour les factures d'eau et d'électricité.

Les défis économiques semblent conduire à une insécurité alimentaire généralisée : en Côte d’Ivoire, plus de 70% des interrogées ont épuisé leurs économies afin d’acheter de la nourriture; la baisse de leurs revenus a empêchés 61% d'acheter la quantité habituelle, et plus de 40% ont réduit la taille de leurs portions ou le nombre de repas. Au Burkina Faso, 30% ont épuisés leurs économies pour payer la nourriture, 48% ont acheté moins en raison de la baisse des revenus et 25% ont réduit les portions de repas consommées. Cette situation risque de s'aggraver dans les deux pays avec les pics saisonniers de malnutrition et de paludisme.

En Côte d’Ivoire, alors que les écoles étaient fermées, environ 70% des enfants passaient du temps à l'éducation à la maison, principalement chez les ménages les plus riches. La grande majorité de ces élèves utilisaient des livres pour étudier. Environ 20% consacraient plus de 10 heures par semaine à l’éducation, et une majorité passait du temps aux tâches ménagères. Au Burkina Faso, où les écoles restent fermées, seule la moitié des élèves continue d'apprendre à la maison, grâce aux livres et aux membres du ménage. Seuls 65% des répondants ont déclaré que leurs élèves retourneraient définitivement à l'école. Ces résultats suggèrent que la fermeture peut avoir des conséquences à long terme pour ces enfants, similaires à celles observées au lendemain de la pandémie d'Ebola en Afrique de l'Ouest, où 25% des enfants au Libéria et 13% en Sierra Leone ont quitté définitivement l'école. Les attaques récentes ont en outre contraint les enfants à quitter l'école, 2 512 écoles ont fermé en raison de l'insécurité, touchant 350 000 enfants[6] à travers le pays.

Enfin, environ un quart des femmes interrogés[7] au Burkina Faso ont des difficultés à accéder aux services de planification familiale depuis le début de la pandémie. Au Burkina Faso, IPA a travaillé avec DMI pour évaluer une campagne radiophonique[8] sur la planification familiale. 76% des répondants ont entendu des messages radio à ce sujet, suggérant que ce format est efficace. Alors que moins de 30% des femmes utilisaient une méthode contraceptive, plus de 50% ont l’intention de le faire dans le futur. D’après Tessa Swigart et Mireille Belem de DMI, les impacts économiques de la pandémie déplacent les priorités de la planification familiale vers les besoins quotidiens[9]. Alors que le gouvernement burkinabé a récemment déployé la contraception gratuite, DMI travaille à favoriser l’accès à ces services gratuits.

Des webinaires en français et en anglais ont été organisés en Juillet 2020 pour partager les conclusions et les perspectives politiques du premier cycle des enquêtes RECOVR Côte d’Ivoire et Burkina Faso (un enregistrement est disponible sur https://www.youtube.com/watch?v=xp7pZ-685H4).


Innovations for Poverty Action (IPA) a pour mission de découvrir et de divulguer des solutions efficaces pour lutter contre la pauvreté dans le monde. En partenariat avec les décideurs politiques, IPA conçoit, évalue rigoureusement et aide à améliorer les programmes de développement ainsi que la manière dont ils sont mis en œuvre.

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