Riz de luxe, crèmes à l'hydroquinone, alcools, tabac… : Le cabinet Mondon commente l’annexe fiscale 2021
Adoptée par l’Assemblée nationale le 20 décembre, l’annexe fiscale à la loi de finances pour la gestion budgétaire 2021 entre en vigueur ce 8 janvier, a révélé le Cabinet Mondon aux chefs d’entreprises, aux organisations professionnelles du secteur privé et à la presse réunis à la Maison de l’entreprise à Abidjan-Plateau.
L’élaboration du présent projet d’annexe fiscale 2021 se fait dans un contexte mondial marqué par une crise sanitaire inédite causée par la pandémie de coronavirus (Covid-19) qui a des répercussions tant au plan social qu’au plan économique. En Côte d’Ivoire, cette situation entrainera une décélération de la croissance économique, alors que depuis 2011, le pays enregistre des taux de croissance parmi les plus élevés au monde.
Elaborée dans un contexte de crise sanitaire ayant entraîné une décélération de la croissance économique de la Côte d’Ivoire en 2020, cette annexe fiscale devrait contribuer à l’objectif du gouvernement en 2021 qui est d’inverser cette décélération. Cela devrait conduire à entreprendre des actions vigoureuses en adéquation avec le Plan national de développement 2021-2025, en vue de relancer significativement la croissance, avait annoncé le gouvernement dans l’exposé des motifs.
« L’année 2021 devra être ainsi celle d’une reprise robuste. Dans cette perspective, il est nécessaire de définir une politique fiscale axée sur cet objectif général. Cette politique aura un double objectif : améliorer significativement le taux de pression fiscale, tout en veillant à sa meilleure répartition ; contribuer à la transformation structurelle de l’économie », ajoutait l’exposé.
Pour Pacöme Mondon, expert fiscaliste et associé gérant du cabinet éponyme, « l’annexe fiscale 2021 vise principalement à optimiser les recettes budgétaires nécessaires pour le financement des ambitieux programmes du gouvernement ».
Au titre des innovations de l’annexe fiscale 2021, on note « l’absence de mesures en faveur des entreprises. On relève cependant des mesures à caractère social liées à l’encouragement de la mobilisation de l’épargne longue et à l’accessibilité des produits pharmaceutiques », souligne le cabinet.
La première de ces mesures, fait observer le cabinet, c’est « l’exonération de l’impôt sur le revenu des créances, des intérêts versés aux souscripteurs des contrats d’assurance-vie ». Pour Pacôme Mondon, cette disposition « participe d’une volonté politique de réduire la charge fiscale des petits épargnants de sorte à encourager les ménages à mobiliser l’épargne longue ».
Deuxième mesure à caractère sociale soulignée, « l’exonération du droit sur le chiffre d’affaires de la contribution des patentes, des dépôts de vente de produits pharmaceutiques situés en zones rurales. Une mesure de nature à favoriser l’ouverture d’officines en régions rurales « pour une plus grande accessibilité des produits pharmaceutiques aux populations rurales généralement attachées à la pharmacopée traditionnelle ». Il faut dire que le secteur pharmaceutique bénéficie également de mesures de faveur dans le cadre de cette annexe fiscale qui exonère de la TVA et de la taxe spéciale d’équipement, les commissions perçues par les grossistes et les pharmacies dans le cadre de la distribution des médicaments de la Nouvelle pharmacie de la santé publique aux bénéficiaires de la Couverture maladie universelle, précise le fiscaliste.
Autre fait notable : la réforme de la fiscalité applicable aux PME qu’entérine l’article 33 du texte qui institue deux régimes d’imposition et réaménage les régimes réels d’imposition.
Ainsi, les entreprises qui réalisent un chiffre d’affaire toutes taxes comprises qui se situe entre 5 millions de Francs Cfa et 200 millions relèvent des régimes d’imposition suivants : le régime de l’entreprenant pour un chiffre d’affaires entre 5 et 50 millions ; et le régime des microentreprises (chiffre d’affaires se sitaunt entre 50 millions et 200 millions FCfa.
Le commentaire du cabinet : « dans ce contexte de crise sanitaire qui a durement secoué le secteur privé en général et les PME en particulier, des mesures de soutien aux entreprises étaient fortement attendues. La réforme instaurée par l’annexe fiscale simplifie certes la fiscalité applicable aux PME, mais accentue la pression fiscale sur ces entreprises avec des taux d’imposition allant de 2% à 7% du chiffre d’affaires ».
Tabac, alcool, riz de luxe, produits cosmétiques, crèmes à l'hydroquinone : nouvelles charges fiscales
Au titre des mesures prises pour augmenter les recettes de l’Etats, on note un aménagement des dispositions relatives aux droits d’accises sur le tabac et les boissons alcoolisées (article 6 de l’annexe). Depuis l’annexe fiscale 2018, on note un relèvement chaque année du taux des droits d’accises applicable au tabac d’un point. L’annexe fiscale 2021 poursuit cette tradition en relevant d’un point le taux d’accises applicable aux tabacs qui passe de 38% à 39%. Ce qui aboutit à un taux effectif d’imposition des produits du tabac de 46% (soit 39% de droits d’accises, 5% de taxe spéciale sur le sport et 2% de contribution à la lutte contre le Sida).
S’agissant des boissons alcoolisées, l’article 4 de l’annexe prévoit un taux de 45% applicable aux boissons alcoolisées titrant 35% d’alcool ; et l’exclusion des intrants importés, notamment le vin pour la fabrication locale de produits finis de la base imposable aux droits d’accises.
Des droits d’accises au taux de 10% sont institués sur certains produits cosmétiques tels les produits de beauté ou de maquillage et préparations pour l’entretien ou les soins de la peau autres que les médicaments, mais aussi les préparations capillaires (shampoing, préparations pour l’ondulation et le défrisage permanent, laques pour les cheveux...), les parfums et d’autres produits comme ceux d’extension ou de rajout de cheveux ou les mèches.
Pour les produits cosmétiques contenant de l’hydroquinone, le taux des droits d’accises grimpe à 50%. Cela suffira-t-il à décourager les adeptes de ces produits ? La pratique nous situera.
L’on enregistre par ailleurs un aménagement des dispositions applicables en matière de taxe sur la valeur ajoutée à certains produits alimentaires naturels. Selon l’exposé des motifs de l’article 6 de l’annexe, l’exonération de la TVA sur les produits alimentaires de première nécessité prévue par une directive de l’Uemoa ne devrait pas s’appliquer au riz de luxe et à la viande importée. Désormais, souligne Mondon, le riz de luxe ainsi que la viande importée en dehors de la zone Cedeao sont soumis à la Tva au taux réduit de 9%. « Il convient de préciser que les caractéristiques du riz de luxe à soumettre à la Tva seront déterminées par un arrêté interministériel du ministre du Budget, du ministre en charge du commerce et du ministre en charge du riz », ajoute le cabinet.
En clôturant cette cérémonie, le vice-président de la CGECI, Philippe Eponon représentant le président Jean-Marie Ackah empêché a dit espérer un renforcement de la collaboration secteur privé-secteur public pour des mesures plus consensuelles.
« Le Président de la CGECI a instruit la Direction Exécutive de continuer l’inventaire des mesures qui posent problèmes, de mesurer leur impact réel sur les entreprises et de travailler à trouver déjà des pistes de solutions dans les notes de doctrine ou notes de service qui seront prises par l’Administration », a révélé M. Eponon.
De même, à l’en croire, « le Patronat reste mobilisé dans son plaidoyer pour la mise en œuvre effective de la réforme fiscale adoptée depuis quelques années, qui devrait privilégier l’élargissement de l’assiette fiscale pour éviter une pression inconsidérée sur un nombre limité d’entreprises du secteur formel ».
Valentin MBOUGUENG