
Joseph Guessan Bi Kouamé, Manager et Superviseur des projets de prévention de substances psychoactives au ministère de l'Education nationale et de l'Alphabétisation. (Ph: Sébastien Kouassi)
Joseph Guessan Bi Kouamé, Manager et Superviseur des projets de prévention de substances psychoactives au ministère de l'Education nationale et de l'Alphabétisation. (Ph: Sébastien Kouassi)
Joseph Guessan Bi Kouamé, Manager et Superviseur des projets de prévention de substances psychoactives: "Il faut agir vite contre le tabac en milieu scolaire parce que c’est le départ de tous dérapages"
Autant les facteurs que les conséquences du tabagisme chez les élèves sont nombreux et graves. Dans une interview qu’il nous a accordée, Joseph Guessan Bi Kouamé analyse cette situation et fait des propositions afin de mener à bien la lutte anti-tabac chez cette population jeune.
Malgré les sensibilisations, la Côte d’Ivoire semble toujours touchée par le tabagisme. Quelle est la situation réelle ?
Selon le Pnlta, au niveau mondial, il y a plus de 80 millions de décès par an en raison de la consommation de la cigarette soit environ 600 victimes soit environ 7,5% des populations qui meurent par an des effets des cigarettes. C'est énorme. En Côte d’Ivoire, nous estimons que sur 28 millions d’habitants, il y a 5 000 décès par an pour un taux de 2 pour mille.
Quelle est la proportion d’élèves qui s’adonne à la consommation du tabac et des substances dérivées, et quel est l’âge moyen des fumeurs ?
Au niveau de l’éducation nationale, nous n’avons pas fait d’études. Alors que cela est très important. Nous avons besoin de faire des recherches sur la consommation du tabac en milieu scolaire pour voir la portée du problème. J’ai fait personnellement des études à la fois en milieu scolaire et en milieu rural pour voir les comportements des populations s’agissant de la consommation de certains produits. Mes recherches démontrent qu’en ville, les adolescents fument beaucoup plus que ceux des écoles du village. Cela est dû à l'environnement. Il y a beaucoup d'influences dans les villes. Fumer aujourd’hui pour l’adolescent en Côte d’Ivoire est monnaie courante en raison de plusieurs facteurs, dont le grand nombre de boulangeries et glaciers qui pratiquent le phénomène de shisha et de la cigarette électronique. Nos adolescents de 10 ans envahissent ces lieux et sont initiés très tôt au tabac surtout lors des fêtes populaires. Cela n’est pas bien. L’étude que j'ai faite en 2018-2019 dans une école privée en Côte d’Ivoire, a démontré que ce sont plus les enfants de la classe de 6e jusqu'en 3e qui sont attirés par ce phénomène du tabac et leur âge varie de 10 à 16 ans.
Qu’est-ce qui est fait pour remédier à cela ?
C’est dommage. La Côte d’Ivoire ne dispose pas de véritable politique de lutte anti-tabac ni anti-drogue en milieu scolaire au niveau de l'éducation nationale. Pour lutter contre ces fléaux, c’est par l’éducation. Pour faire la prévention, il n'y a que les maîtres c’est-à-dire les enseignants. Ce sont eux qui sont écoutés par les jeunes gens. Il faut donc former les enseignants à la lutte contre le tabac. Il faut leur donner les moyens moraux, pédagogiques, psychologiques, financiers... Il faut agir vite contre le tabac en milieu scolaire parce qu’il est le départ de tous les dérapages. Il impacte négativement la santé des adolescents, les finances des parents. Il crée la dépendance chez les enfants et ces derniers ne peuvent pas être disposés au travail. C’est le défi qu’il faut relever et l'éducation nationale est consciente de ces problèmes. L’alcool, le tabac, la drogue sont à la base des agressions, des violences à l’école. Il y a urgence, il faut agir vite pour notre jeunesse.
Y a-t-il des cellules anti-tabac dans les écoles en Côte d’Ivoire ?
Il n’y a pas de cellules anti-tabac dans les écoles en Côte d’Ivoire. Nous avons par contre au niveau de l’éducation nationale, des cellules de la Direction de la mutualité et des œuvres sociales en milieu scolaire dans certaines Dren (Direction régionale de l’éducation nationale, Ndlr) où il y a des médecins qui reçoivent des élèves. Le projet que nous ambitionnons avec le Pnlta et l’Oms, c’est d’avoir des pouls de formation des médecins et travailleurs sociaux qui sont dans ces différentes cellules afin que ces derniers aient les bases pour faire face aux problèmes de tabac en milieu scolaire.
Mais avec les partenaires qui sont engagés auprès de l’Etat depuis plusieurs années dans le cadre de la sensibilisation, n’y a-t-il aucune initiative dans ce sens ?
Avec l’Union européenne, nous avons le programme « Unplugged » qui signifie « débrancher » en anglais. Ce programme prend en compte le tabac, l’alcool...
Donnez-nous plus de détails concernant ce projet...
Nous essayons de former des enseignants. Malheureusement, en Côte d’Ivoire, nous n’avons pas été capables de le lancer parce qu’il n’y a toujours pas de budget pour le faire. Mais pour l’heure, nous continuons de sensibiliser. Dans ce projet, il y a la lutte contre le tabac.
Quelle doit être la place des parents dans cette lutte ?
Il faut que les parents soient engagés. Pendant que les enfants sont formés à l’école, qu’ils suivent les cours des enfants dans le cahier. C’est triste, mais les parents en Côte d’Ivoire ne rencontrent pas les enseignants pour le suivi des enfants. Alors que la famille ne doit pas être déconnectée de l’éducation des enfants. Les parents doivent être complices avec les enseignants dans l’éducation des enfants. Ils doivent poursuivre les actions des enseignants. Ils doivent fouiller les effets, être curieux dans tout ce que font leurs enfants.
Y a-t-il un espoir contre ce fléau pour l’école ivoirienne ?
Bien sûr, il suffit simplement que l’autorité, les décideurs soient sensibilisés au phénomène surtout sur la prévention. Il est vrai que la situation est assez alarmante, mais nos enfants sont capables du changement. Il faut que tout le monde se réveille. Les adolescents passent par le tabac pour consommer l’alcool, les stupéfiants. Certes nous n'avons pas un programme fixe de lutte contre le tabac, mais nous travaillons en collaboration avec le ministère en charge de la Santé pour remédier à tout cela. Aussi, l’Etat ivoirien est en train de faire des efforts à travers le ministère de la Santé et le Programme national de lutte contre le tabac et l'addiction. Ce qui intègre carrément le programme d'enseignement à l'école. Le ministère de l’Education nationale et de l’Alphabétisation fait également des efforts pour la sensibilisation, mais le problème de l’administration, ce sont souvent les finances. Nous avons des projets pour la lutte mais l’administration vous dira qu’il n'existe pas de budget pour l’exécuter. C’est cela la grande difficulté. C'est une réalité. Une direction peut prendre sur elle à un moment donné de financer le travail mais c’est très difficile et les projets ne peuvent aboutir. Mais nous continuons de manager, d’expliquer aux autorités la science et l’importance de la prévention contre le tabac.
Quelle est la proportion d’élèves qui s’adonne à la consommation du tabac et des substances dérivées, et quel est l’âge moyen des fumeurs ?
Au niveau de l’éducation nationale, nous n’avons pas fait d’études. Alors que cela est très important. Nous avons besoin de faire des recherches sur la consommation du tabac en milieu scolaire pour voir la portée du problème. J’ai fait personnellement des études à la fois en milieu scolaire et en milieu rural pour voir les comportements des populations s’agissant de la consommation de certains produits. Mes recherches démontrent qu’en ville, les adolescents fument beaucoup plus que ceux des écoles du village. Cela est dû à l'environnement. Il y a beaucoup d'influences dans les villes. Fumer aujourd’hui pour l’adolescent en Côte d’Ivoire est monnaie courante en raison de plusieurs facteurs, dont le grand nombre de boulangeries et glaciers qui pratiquent le phénomène de shisha et de la cigarette électronique. Nos adolescents de 10 ans envahissent ces lieux et sont initiés très tôt au tabac surtout lors des fêtes populaires. Cela n’est pas bien. L’étude que j'ai faite en 2018-2019 dans une école privée en Côte d’Ivoire, a démontré que ce sont plus les enfants de la classe de 6e jusqu'en 3e qui sont attirés par ce phénomène du tabac et leur âge varie de 10 à 16 ans.
Qu’est-ce qui est fait pour remédier à cela ?
C’est dommage. La Côte d’Ivoire ne dispose pas de véritable politique de lutte anti-tabac ni anti-drogue en milieu scolaire au niveau de l'éducation nationale. Pour lutter contre ces fléaux, c’est par l’éducation. Pour faire la prévention, il n'y a que les maîtres c’est-à-dire les enseignants. Ce sont eux qui sont écoutés par les jeunes gens. Il faut donc former les enseignants à la lutte contre le tabac. Il faut leur donner les moyens moraux, pédagogiques, psychologiques, financiers... Il faut agir vite contre le tabac en milieu scolaire parce qu’il est le départ de tous les dérapages. Il impacte négativement la santé des adolescents, les finances des parents. Il crée la dépendance chez les enfants et ces derniers ne peuvent pas être disposés au travail. C’est le défi qu’il faut relever et l'éducation nationale est consciente de ces problèmes. L’alcool, le tabac, la drogue sont à la base des agressions, des violences à l’école. Il y a urgence, il faut agir vite pour notre jeunesse.
Y a-t-il des cellules anti-tabac dans les écoles en Côte d’Ivoire ?
Il n’y a pas de cellules anti-tabac dans les écoles en Côte d’Ivoire. Nous avons par contre au niveau de l’éducation nationale, des cellules de la Direction de la mutualité et des œuvres sociales en milieu scolaire dans certaines Dren (Direction régionale de l’éducation nationale, Ndlr) où il y a des médecins qui reçoivent des élèves. Le projet que nous ambitionnons avec le Pnlta et l’Oms, c’est d’avoir des pouls de formation des médecins et travailleurs sociaux qui sont dans ces différentes cellules afin que ces derniers aient les bases pour faire face aux problèmes de tabac en milieu scolaire.
Mais avec les partenaires qui sont engagés auprès de l’Etat depuis plusieurs années dans le cadre de la sensibilisation, n’y a-t-il aucune initiative dans ce sens ?
Avec l’Union européenne, nous avons le programme « Unplugged » qui signifie « débrancher » en anglais. Ce programme prend en compte le tabac, l’alcool...
Donnez-nous plus de détails concernant ce projet...
Nous essayons de former des enseignants. Malheureusement, en Côte d’Ivoire, nous n’avons pas été capables de le lancer parce qu’il n’y a toujours pas de budget pour le faire. Mais pour l’heure, nous continuons de sensibiliser. Dans ce projet, il y a la lutte contre le tabac.
Quelle doit être la place des parents dans cette lutte ?
Il faut que les parents soient engagés. Pendant que les enfants sont formés à l’école, qu’ils suivent les cours des enfants dans le cahier. C’est triste, mais les parents en Côte d’Ivoire ne rencontrent pas les enseignants pour le suivi des enfants. Alors que la famille ne doit pas être déconnectée de l’éducation des enfants. Les parents doivent être complices avec les enseignants dans l’éducation des enfants. Ils doivent poursuivre les actions des enseignants. Ils doivent fouiller les effets, être curieux dans tout ce que font leurs enfants.
Y a-t-il un espoir contre ce fléau pour l’école ivoirienne ?
Bien sûr, il suffit simplement que l’autorité, les décideurs soient sensibilisés au phénomène surtout sur la prévention. Il est vrai que la situation est assez alarmante, mais nos enfants sont capables du changement. Il faut que tout le monde se réveille. Les adolescents passent par le tabac pour consommer l’alcool, les stupéfiants. Certes nous n'avons pas un programme fixe de lutte contre le tabac, mais nous travaillons en collaboration avec le ministère en charge de la Santé pour remédier à tout cela. Aussi, l’Etat ivoirien est en train de faire des efforts à travers le ministère de la Santé et le Programme national de lutte contre le tabac et l'addiction. Ce qui intègre carrément le programme d'enseignement à l'école. Le ministère de l’Education nationale et de l’Alphabétisation fait également des efforts pour la sensibilisation, mais le problème de l’administration, ce sont souvent les finances. Nous avons des projets pour la lutte mais l’administration vous dira qu’il n'existe pas de budget pour l’exécuter. C’est cela la grande difficulté. C'est une réalité. Une direction peut prendre sur elle à un moment donné de financer le travail mais c’est très difficile et les projets ne peuvent aboutir. Mais nous continuons de manager, d’expliquer aux autorités la science et l’importance de la prévention contre le tabac.