Souveraineté économique, monétaire et financière de l’Afrique: Adama Coulibaly donne les recettes pour y parvenir
Le ministre de l’Economie et des Finances a coanimé un panel portant sur le thème : « L’Afrique face à la reconstitution de l’ordre économique mondial ». La ministre Nialé Kaba en a assuré la modération. C’était lundi dernier, à Cocody, au cours de la cérémonie d’ouverture de l’édition 2022 du Forum international sur le leadership et la prospective organisé par le Centre d’études prospectives (Cep).
A cette occasion, Adama Coulibaly s’est attelé d’abord à éplucher certains concepts clés. Notamment la souveraineté alimentaire et économique vue
sous l’angle de l’industrialisation et de la souveraineté monétaire.
Abordant la question de la dépendance alimentaire, Adama Coulibaly dit ne pas comprendre que l’Afrique qui dispose de plus de 60% des terres arables du monde, puisse éprouver de réelles difficultés pour assurer sa souveraineté alimentaire ; une situation qui s’est notamment accrue avec la crise russo-ukrainienne. Ce, à cause du manque d’approvisionnement en engrais et en blé.
Relativement à la dépendance économique, le ministre de l’Economie et des Finances regrette que plus de 60 ans après leur indépendance, les pays africains continuent d’exporter des matières premières, aussi bien pour les produits agricoles que miniers. De sorte que finalement, la valeur ajoutée est essentiellement captée par les pays qui transforment et commercialisent lesdits produits. Prenant l’exemple du cacao, il a indiqué que l’industrie du chocolat rapporte 110 milliards de dollars. « Les pays producteurs comme la Côte d’Ivoire, le Ghana, le Cameroun, le Nigeria captent seulement 6% ; ce qui fait moins de 6 milliards de dollars. C’est quand même choquant que des pays, des populations qui s’échinent à produire ne puissent pas engranger suffisamment de ressources pour rémunérer leur labeur. C’est un problème assez sérieux », déplore-t-il, tout en notant que le constat est le même sur le plan minier.
Poursuivant son exposé, le ministre de l’Economie et des Finances a noté que la souveraineté monétaire et financière suppose l’intégration du continent. Il s’est félicité de la prise de conscience et surtout de la volonté politique et des avancées très importantes sur la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf). Son souhait est que cette zone de libre-échange aboutisse à une monnaie qui soit capable de fluidifier les échanges.
« Les échanges intra-africains aujourd’hui, c’est 16%. En Europe, au niveau de l’Union européenne (UE) qui dispose de la même monnaie, l’euro, les échanges intra-européens, c’est 68%, c’est-à-dire que les pays échangent plus des 2/3 en termes d’importation et d’exportation. En Asie, c’est 59% d’échanges. Comparativement à l’Afrique où on a 16%, le constat est que les pays n’échangent pas entre eux. Il faut donc aller vers des mécanismes qui permettent de soutenir, de renforcer davantage, de booster les échanges entre eux ».
En Afrique, regrette Adama Coulibaly, la multiplicité des monnaies en circulation sur le continent ne facilite pas les échanges. Et parfois, pour des paiements entre pays voisins, il faut recourir à un pays tiers hors du continent. Il faut développer, insiste-t-il, le marché des capitaux en Afrique. Toutefois, rassure-t-il, l’Union africaine en a conscience. A ce propos, il a fait savoir qu’il est prévu de développer une union douanière, une zone économique, un marché commun africain et une union monétaire africaine.
« Dans le cadre de l’agenda 2063, il est prévu justement sur la période décennale 2013-2023 des jalons. Et nous voyons ces jalons avec la Zlecaf. Donc, il faut faire en sorte que cette monnaie unique soit une réalité et qu’elle puisse soutenir les échanges sur le continent », révèle-t-il.
AK avec Sercom
Légende : Adama Coulibaly interpelle le continent sur la nécessité d’avoir une monnaie unique.