Les Lévites Inter : « Les chantres ivoiriens ne sont pas solidaires »
La musique chrétienne nourrit-elle son homme ?
Dans le cadre de notre sacerdoce, nous ne fixons pas de cachet. Nos prestations dans les églises et campagnes d’évangélisation...n’ont pas de coût. Notre objectif principal est d’œuvrer pour la gloire de Dieu. Ce que nous savons faire de meilleur, est la louange et l’adoration. Pour répondre à votre question, nous disons que Dieu prend soin de nous car à chaque jour suffit sa peine. À côté, nous sommes dans l’événementiel, nous organisons des événements tels que les concerts. Récemment, nous avons organisé les 50 ans de carrière du célèbre artiste ivoirien Bailly Spinto. Nous vivons de notre art.
Interprétez-vous des chants non-chrétiens ?
Oui, nous interprétons également des chants non-chrétiens parce que nous sommes d’abord des acteurs culturels. Nous avons fait de la musique notre métier. Nous mettons notre talent à profit pour financer nos actions humanitaires en matière de lutte contre les hépatites virales. Et nous interprétons merveilleusement parce que nous avons la formation requise pour le faire. Nous avons participé à des finales d’émissions musicales telles que Podium (concours musical de la télévision nationale, Ndlr). Nous avons également joué avec le groupe Magic System, Meiway, Bailly Spinto...
N’avez-vous pas peur d’être jugé par les autres chantres et leaders chrétiens du fait que vous interprétiez des chants non-chrétiens ?
Nous pouvons vous rassurer que nous n’avons pas cette casquette de chanter pour le monde. Certes, nous interprétons à la demande des clients des morceaux des artistes tels que Meiway, mais nous demeurons des chantres. Aussi, nous sommes engagés dans la lutte contre les hépatites virales. À cet effet, nous prestons pour recueillir des fonds et cette lutte n’a pas de coloration ethnique ni religieuse. Nous offrons des vaccins et les dépistages à tout le monde sans exception.

Après 17 années de carrière pensez-vous que votre message est bien perçu ?
Notre musique est écoutée par tout le monde. Le message est perçu par les croyants ou non-croyants. L’évangile est annoncé, il fortifie les âmes. Plusieurs personnes reçoivent leurs miracles par notre musique et rendent grâce à Dieu. Dénommé « L’heure a sonné », notre premier album est sorti en 2005. Plusieurs chants sur cet album ont été appréciés par le public tant au niveau national qu’international. L’album s’est vraiment bien comporté sur le marché. Des chants tels que : « La tempête se déchaîne, mon cœur est en peine... j’ai vu mon Dieu près de moi arrière de mon Satan, Jésus me tient... », « Il me soutient, il ne dort pas, il conduit toujours mes pas... » étaient chantés partout. L’album nous a fait voyager dans le monde. Au point où nous n’avons pas pu faire la promotion dans notre pays. La musique est connue en Côte d’Ivoire mais nous, les auteurs, ne sommes pas connus tout simplement parce qu’au moment où nos chants faisaient l’hymne des populations nous étions déjà à l’étranger pour l’accomplissement d’un contrat qui a duré des années. Aujourd’hui, certains de nos chants sont des sonneries de téléphones portables. Des personnes les chantent au quotidien. Mais aucune œuvre humaine n’est parfaite, il y a encore du travail à faire.
Regrettez-vous cela aujourd’hui ?
Non pas du tout ! Si nos chants sont plus connus que nous, cela contribue à l'évangélisation. A Dieu la gloire ! Lorsque l’album est sorti nous n’avons pas pu terminer le programme de la promotion et il y a eu de nombreux voyages. En son temps, les réseaux sociaux n’étaient pas aussi développés que maintenant, sinon nous serions également connus.
Qu’en est-il de vos œuvres caritatives ?
Au départ nous n’avons pas été compris. Plusieurs nous conseillaient de nous limiter à la musique lorsque nous leur proposions notre projet humanitaire. Aujourd’hui, nos actions humanitaires sont comprises. Notre appel pour lutter contre les hépatites virales est divin, le Christ nous demande d’être charitables envers nos prochains. L’humanitaire nous mène partout. Les portes des mosquées, celles des églises nous sont ouvertes. Nous sommes des ambassadeurs dans le domaine de la santé et notre rôle est de lutter efficacement contre cette pathologie qui tue. Nous sensibilisons, offrons, sous fonds propres, des vaccins aux enfants souffrant de cette pathologie... Nous reconnaissons qu’il y a beaucoup à faire parce que l’Organisation mondiale de la santé nous indique que cette pathologie doit être éradiquée d’ici à 2030.
Quels sont vos relations avec les hommes de Dieu et les artistes chrétiens ?
Nous nous approchons des serviteurs de Dieu mais en général nous collaborons avec ceux qui sont humanitaires. Ceux qui ont compris que la foi chrétienne rime avec les actes. ‘’La foi sans les œuvres est vaine’’, c’est donc une bonne chose de donner à ceux qui en ont besoin. Au sujet des chantres ivoiriens, nous disons qu’ils ne sont pas solidaires. Les chantres en Côte d’Ivoire sont encore à l’étape des barrières communautaires. Où chacun suppose qu’il est super occupé et qu’il doit uniquement travailler sur ses projets. Les chantres sont solitaires. Ce qui est différent des artistes du coupé décalé, des humoristes. Ces derniers sont solidaires et se soutiennent mutuellement lorsqu’il y a un évènement. Nous déplorons le fait que l’église qui doit sauver soit plus divisée. Pour notre part, nous restons focus sur notre vision qui est le Christ. C’est pourquoi, nous avons de bons rapports avec tout le monde et participons aux différentes associations d’artistes. Qu’elles soient chrétiennes ou pas.

Vous n’avez jamais été cités dans des histoires de sexe, de drogue ni dans une situation compromettante. Comment faites-vous pour maintenir votre image ?
C’est naturel et cela dépend souvent de l'orientation de l'éducation des parents. Depuis nos jeunes âges, nous étions très actifs à l'église dans des groupes musicaux. Toutefois nous avons grandi à Treichville, dans notre quartier, il y avait la drogue, la prostitution mais nous étions tout le temps dans les lieux de culte. Nos familles nous obligeaient à y être. Avec le temps, nous avons compris l’importance de la parole de Dieu et chacun a décidé de marcher pieusement selon cette parole. Pour nous maintenir dans ce rythme, puisque le péché n’est jamais loin, nous avons un régime spirituel tout comme le régime alimentaire. Ainsi dans la semaine nous disposons d’un temps de jeûne. Nous avons des temps de jeunes individuels et collectifs. Le diable attaque toujours les enfants de Dieu, il faut toujours être à la brèche. Il faut s’imposer un régime spirituel. Le jeûne et la présence de Dieu nous éloigne de tout ce qui est négatif.
Quel est votre actualité ?
Intitulé « Accomplissement », notre nouvel album comprend 28 titres dans lequel vous trouvez tous les genres musicaux reggae, zouglou, coupé décalé, ou du Nigeria... Dans cet album que nous même avions produit, plusieurs musiciens professionnels de la Côte d’Ivoire et de l’extérieur y sont intervenus. C’est le résultat de 02 années de travail avec 4 arrangements. L’album contient également un chant sur les hépatites virales. Concernant le morceau phare, nous voulons laisser la latitude au public de faire son choix parmi les 28 morceaux.
Quel est le nouveau défi à relever à ce stade ?
Pour cet album, nous mettons particulièrement l’accent sur la non-transmission mère-enfant. Car, en Côte d’Ivoire 80% des femmes enceintes transmettent l'hépatite virale à leurs enfants. Nous voulons sensibiliser. Nous voulons que l'enfant reçoive effectivement son vaccin, que la femme enceinte soit dépistée tôt afin qu’elle prenne des dispositions jusqu'à son accouchement pour la protection de l’enfant. En outre nous disons que notre engagement humanitaire mérite d’être accompagné à tout point de vue et par les guides religieux, les autorités et les personnes éprises d’humanisme. C’est à cela que Dieu nous attend, venir en aide aux autres.