Amani Yao César Lambert, ancien joueur et entraîneur de l’Asec. (Ph: Dr)
Amani Yao (ancien joueur et entraîneur de l’Asec): "Il faut prospecter en Afrique et trouver des joueurs offensifs"
Quelle analyse faites-vous du parcours de l’Asec en Coupe africaine cette saison ?
L’Asec a commencé difficilement cette aventure. En Ligue des champions, les Mimos ont été sortis par Horoya et reversés en Coupe de la Confédération. Beaucoup ont pensé que l’équipe allait s’arrêter en phase de poules parce qu’elle avait montré beaucoup de difficultés. L’attaque a été le gros problème de l’équipe durant cette compétition. On ne les attendait pas en demi-finale au regard de leur entame de la compétition. Il y a eu ensuite le déclic après toutes les critiques qu’ils ont essuyées. Il y a eu la révolte et à partir de la 3e journée, ils se sont bien repris pour être en demi-finale.
Que faut-il à cette équipe de l’Asec pour faire partie des cadors du continent, selon vous ?
Le football ivoirien ne peut pas se résumer à un seul club. Depuis 1998, cela fait 25 ans, soit un quart de siècle qu’on n’a pas vu un club ivoirien remporter la Ligue des champions. L’Asec est victime de son avance sur les autres clubs ivoiriens. C’est un peu le problème du Paris Saint Germain en France. Quand vous avez une telle avance dans un championnat qui est très moyen, vous pouvez survoler les compétitions locales mais après sur le continent, c’est compliqué. Au moment où l’Asec gagnait la Coupe d’Afrique en 1998, le Stella, le Stade, l’Africa avaient encore un bon niveau. A cette époque, le championnat de Côte d’Ivoire, chaque dimanche, ressemblait à un match de Coupe d’Afrique. Maintenant l’Asec a pris tellement d’avance que les autres ont du mal à suivre ou refusent de se professionnaliser. Ce qui fait que le niveau du football local est très faible. La preuve, toutes les équipes ivoiriennes en coupe africaine n’arrivent plus à sortir des poules.
Est-ce la seule raison qui explique que l’équipe n’arrive plus à reconquérir l’Afrique ?
Est-ce la seule raison qui explique que l’équipe n’arrive plus à reconquérir l’Afrique ?
Au niveau du recrutement aussi il faut pousser un peu plus loin. Il faut trouver de bons joueurs sur le plan africain. Au niveau local, je n’en vois pas trop. en ce qui concerne la formation, les joueurs partent très jeunes. Malheureusement, c’est la règle du jeu, à savoir former, faire de la compétition et être vendu pour avoir un retour sur investissement. L'Asec doit beaucoup prospecter en Afrique et essayer de trouver des joueurs offensifs qui leur ont manqué pour pouvoir franchir un palier.
L’Asec a-t-il aujourd’hui les moyens d’aller chercher ces oiseaux rares ?
L’Asec a-t-il aujourd’hui les moyens d’aller chercher ces oiseaux rares ?
Vu la renommée du club, il peut le faire. Après, il faut reconnaître que cela a un coût. Les tarifs pratiqués dans le Maghreb en Tanzanie ou en Rd Congo, par exemple, sont exorbitants. C’est difficile de débaucher ces joueurs pour les embaucher ici. Si voulez faire de la surenchère, vous risquez de mettre en danger votre propre structure parce qu’il y a des salaires sur lesquels l’Asec ne pourra s’aligner. Aujourd’hui, ces clubs payent jusqu’à 10 millions de FCfa de salaire à certains de leurs joueurs.
Ne pensez-vous pas qu’il faut une volonté politique des dirigeants pour aller reconquérir l’Afrique ?
Ne pensez-vous pas qu’il faut une volonté politique des dirigeants pour aller reconquérir l’Afrique ?
Certains sportifs estiment que le président de l’Asec n’a plus d’ambitions. Je ne pense pas que ce soit cela. Il a toujours dit qu’il est un bâtisseur et après Sol Béni, il est en train de construire Gboro Gbata. Mais il n’a jamais dit aux joueurs et à son staff de ne pas aller chercher la Coupe d’Afrique. Il n’a jamais dit également à une assemblée générale que chaque année il ira gagner la Coupe d’Afrique. C’est impossible de la gagner chaque année. Mais c’est pourtant l’un des objectifs majeurs pour lequel il se bat pour être champion de Côte d’Ivoire. Il a toujours en tête de bâtir quelque chose pour son club pour que lorsqu’il ne sera plus là, celui qui prendra les rênes du club n’aura plus autre chose à faire qu’à se concentrer sur les résultats sportifs parce que tout serait déjà en place. C’est aux joueurs de comprendre cela en créant leur histoire en allant gagner la Coupe d’Afrique.
Peut-on en même temps construire et gagner des trophées ?
Peut-on en même temps construire et gagner des trophées ?
C’est possible parce que quand vous regarder les pays arabes, les clubs se sont construits en même temps qu’ils gagnent. C’est possible de le faire ici mais en même temps, il ne faudrait pas que le football ivoirien soit limité à un seul club. Quand vous êtes un borgne parmi les aveugles, vous ne pouvez pas avancer comme les autres ailleurs. Les responsables des autres clubs sont les premiers responsables de cette situation. Il faut avoir une vision quand on est dirigeant de club. Il faut imposer un cahier des charges. L’Asec n’est pas mis en difficulté sur le plan local, comment peut-il s’imposer sur le plan international ?