Gouvernance de l'Afrique: La double nationalité, un débat à contre-sens
De la République démocratique du Congo à Madagascar, en passant par le Mali quelques esprits maliens tentent d’instrumentaliser la double nationalité à fins politiques. Plus qu’une erreur, cette stratégie est une faute en Afrique où le débat sur la double nationalité arrive à contre-courant des réalités historiques, de l’ouverture au monde et du dynamisme de la diaspora.
C’est un combat d’arrière-garde pour les uns ; une démarche à contre-sens pour les autres. D’autres encore perçoivent le débat sur la double nationalité que certains esprits tentent de mobiliser des fins politiques contre une aventure sans lendemain au regard de l’histoire de l’Afrique et de ses réalités actuelles.
La leçon des pères fondateurs
L’Ivoirien Félix Houphouët-Boigny fut plusieurs fois ministres de la république française avant de devenir le premier président de la Côte d’Ivoire indépendante. Le Nigérien Hamani Diori fut député à l’Assemblée nationale française avant de devenir le premier président de la république indépendante du Niger. Le premier est aujourd’hui encore considéré comme le bâtisseur de la Côte d’Ivoire, cité en référence par ses successeurs et ses compatriotes. Au Niger, Hamani Diori est, à ce jour encore, aux yeux de ses compatriotes l’homme politique qui a posé les fondations solides de la nation nigérienne ; celui a tracé la voie que ses successeurs ont suivi. Tous deux étaient des citoyens français avant de devenir de grands bâtisseurs de leur pays après les indépendances. Qui peut aujourd’hui les accuser, avec arguments recevables, de n’avoir pas défendu, quoi qu’il en coûte, les intérêts de leur pays, de ne l’avoir pas servi avec courage et abnégation, sous prétexte qu’ils ont été citoyens français avant les indépendances.
Certes après les indépendances, certains Etats du continent ont choisi l’option de la nationalité unique et exclusive. C’est, notamment, le cas de Madagascar, du Niger et du Cameroun. Tenant compte de l’évolution du monde, le Niger a abandonné en 2015 la disposition de la nationalité exclusive et reconnu le principe de la double nationalité à ces citoyens. C’est une juste mesure d’équité d’autant qu’une partie de l’élite économique, politique et scientifique nigérienne avait, de fait, la double nationalité.
Pour Madagascar, il s’agit bien d’une polémique instrumentalisée en amont des élections. Si elle n’a pas encore été abandonnée, la perte de la nationalité malgache après l’acquisition d’une autre nationalité, reste toutefois très encadrée. En effet, les articles 43 et 45 du code de la nationalité assujettissent la perte de la nationalité malgache à l’autorisation du gouvernement. Dans la pratique, tant que le gouvernement ne dit pas que vous avez perdu la nationalité malgache, vous la conservez. Sans distinction de rang social ou de fonction politique.
Sur le plan panafricain et comparatif, au Cameroun, les mœurs influencent les tendances où les assises de la diaspora ont souhaité pour que la double nationalité soit reconnue. Le pouvoir a prêté une oreille attentive à cette revendication et les prochains jours pourraient consacrer l’abandon de la nationalité camerounaise exclusive.
Une évolution inéluctable
Comme au Niger, l’évolution vers l’acceptation de la double nationalité est inéluctable au Cameroun, à Madagascar, en RDC et dans d’autres pays du continent. Elle correspond à l’air du temps. L’ouverture de l’Afrique au reste du monde et son internationalisation à travers la libre circulation des personnes et des biens, que vient de consacrer la création par les chefs d’État du continent de la Zone de libres échanges économiques continentale (ZLECAF), passent par la reconnaissance du principe de la citoyenneté multiple, y compris pour les plus hauts dirigeants politiques.
On ne peut prôner ce grand projet d’intégration économique continentale et refuser en même temps à un Sud-Africain de devenir Mozambicain, à un Nigérien de devenir Ivoirien ou à un Tchadien de devenir Algérien. La reconnaissance de la double nationalité est également un acte de justice envers la diaspora africaine qui assure une contribution économique considérable au pays d’origine. Selon les chiffres de la Banque mondiale, bon an mal an, les Égyptiens établis à l’étranger envoient annuellement près de 22 milliards de dollars en Égypte. Les Nigérians transfèrent chaque année près de 20 milliards de dollars vers le Nigeria alors que l’argent envoyé par les Maliens de l’extérieur au Mali chaque année dépasse l’aide publique au développement accordé à leur pays par la communauté internationale. On ne peut exclure raisonnable toute cette diaspora africaine des affaires politiques dans le pays d’origine, au motif qu’elle a pris la nationalité du pays d’accueil, souvent tout simplement pour mieux servir le pays d’origine. Il serait injustice et même inacceptable de lui dire qu’on apprécie son transfert d’argent mais que la politique est une affaire trop sérieuse pour qu’on l’y associe.
Juger à l’aune du patriotisme et de l’attachement au pays
Plus qu’ailleurs dans le monde, en Afrique les citoyens mais surtout les dirigeants politique doivent être jugés non pas sur la nationalité mais sur les services rendus à la nation et leur attachement au pays ; à la défense de ses intérêts supérieurs. Il ne fait guère de doute que Lee White, citoyen Britano-gabonais, ministre gabonais des Eaux et Forêts et de la Mer, défend les intérêts du Gabon dans son secteur autant et, sans doute, même mieux que ses prédécesseurs qui ont eux une seule nationalité. On doit ainsi juger le président malgache Rajoelina sur son engagement en faveur des producteurs de la vanille, sa défense des intérêts de Madagascar dans le contentieux sur les îles Eparses, son engagement au service de la bonne gouvernance et la lutte contre la pauvreté.
Il n’aura échappé à aucun analyste de bonne foi que depuis son entrée dans la vie politique le président Rajoelina est entièrement investi dans le développement et le redressement de son pays. En deux passages à la tête de l’État (la transition et aujourd’hui), il aura apporté la preuve de son patriotisme qui fait que sa candidature à la prochaine élection présidentielle est une chance pour Madagascar.
Au Niger, au Cameroun, à Madagascar et ailleurs sur le continent, le vrai débat ne doit pas porter sur la double nationalité, mais sur comment ne pas exclure, sous aucun prétexte, de la compétition politique des citoyens dévoués pour l’intérêt national et le bien-être du peuple.
La leçon des pères fondateurs
L’Ivoirien Félix Houphouët-Boigny fut plusieurs fois ministres de la république française avant de devenir le premier président de la Côte d’Ivoire indépendante. Le Nigérien Hamani Diori fut député à l’Assemblée nationale française avant de devenir le premier président de la république indépendante du Niger. Le premier est aujourd’hui encore considéré comme le bâtisseur de la Côte d’Ivoire, cité en référence par ses successeurs et ses compatriotes. Au Niger, Hamani Diori est, à ce jour encore, aux yeux de ses compatriotes l’homme politique qui a posé les fondations solides de la nation nigérienne ; celui a tracé la voie que ses successeurs ont suivi. Tous deux étaient des citoyens français avant de devenir de grands bâtisseurs de leur pays après les indépendances. Qui peut aujourd’hui les accuser, avec arguments recevables, de n’avoir pas défendu, quoi qu’il en coûte, les intérêts de leur pays, de ne l’avoir pas servi avec courage et abnégation, sous prétexte qu’ils ont été citoyens français avant les indépendances.
Certes après les indépendances, certains Etats du continent ont choisi l’option de la nationalité unique et exclusive. C’est, notamment, le cas de Madagascar, du Niger et du Cameroun. Tenant compte de l’évolution du monde, le Niger a abandonné en 2015 la disposition de la nationalité exclusive et reconnu le principe de la double nationalité à ces citoyens. C’est une juste mesure d’équité d’autant qu’une partie de l’élite économique, politique et scientifique nigérienne avait, de fait, la double nationalité.
Pour Madagascar, il s’agit bien d’une polémique instrumentalisée en amont des élections. Si elle n’a pas encore été abandonnée, la perte de la nationalité malgache après l’acquisition d’une autre nationalité, reste toutefois très encadrée. En effet, les articles 43 et 45 du code de la nationalité assujettissent la perte de la nationalité malgache à l’autorisation du gouvernement. Dans la pratique, tant que le gouvernement ne dit pas que vous avez perdu la nationalité malgache, vous la conservez. Sans distinction de rang social ou de fonction politique.
Sur le plan panafricain et comparatif, au Cameroun, les mœurs influencent les tendances où les assises de la diaspora ont souhaité pour que la double nationalité soit reconnue. Le pouvoir a prêté une oreille attentive à cette revendication et les prochains jours pourraient consacrer l’abandon de la nationalité camerounaise exclusive.
Une évolution inéluctable
Comme au Niger, l’évolution vers l’acceptation de la double nationalité est inéluctable au Cameroun, à Madagascar, en RDC et dans d’autres pays du continent. Elle correspond à l’air du temps. L’ouverture de l’Afrique au reste du monde et son internationalisation à travers la libre circulation des personnes et des biens, que vient de consacrer la création par les chefs d’État du continent de la Zone de libres échanges économiques continentale (ZLECAF), passent par la reconnaissance du principe de la citoyenneté multiple, y compris pour les plus hauts dirigeants politiques.
On ne peut prôner ce grand projet d’intégration économique continentale et refuser en même temps à un Sud-Africain de devenir Mozambicain, à un Nigérien de devenir Ivoirien ou à un Tchadien de devenir Algérien. La reconnaissance de la double nationalité est également un acte de justice envers la diaspora africaine qui assure une contribution économique considérable au pays d’origine. Selon les chiffres de la Banque mondiale, bon an mal an, les Égyptiens établis à l’étranger envoient annuellement près de 22 milliards de dollars en Égypte. Les Nigérians transfèrent chaque année près de 20 milliards de dollars vers le Nigeria alors que l’argent envoyé par les Maliens de l’extérieur au Mali chaque année dépasse l’aide publique au développement accordé à leur pays par la communauté internationale. On ne peut exclure raisonnable toute cette diaspora africaine des affaires politiques dans le pays d’origine, au motif qu’elle a pris la nationalité du pays d’accueil, souvent tout simplement pour mieux servir le pays d’origine. Il serait injustice et même inacceptable de lui dire qu’on apprécie son transfert d’argent mais que la politique est une affaire trop sérieuse pour qu’on l’y associe.
Juger à l’aune du patriotisme et de l’attachement au pays
Plus qu’ailleurs dans le monde, en Afrique les citoyens mais surtout les dirigeants politique doivent être jugés non pas sur la nationalité mais sur les services rendus à la nation et leur attachement au pays ; à la défense de ses intérêts supérieurs. Il ne fait guère de doute que Lee White, citoyen Britano-gabonais, ministre gabonais des Eaux et Forêts et de la Mer, défend les intérêts du Gabon dans son secteur autant et, sans doute, même mieux que ses prédécesseurs qui ont eux une seule nationalité. On doit ainsi juger le président malgache Rajoelina sur son engagement en faveur des producteurs de la vanille, sa défense des intérêts de Madagascar dans le contentieux sur les îles Eparses, son engagement au service de la bonne gouvernance et la lutte contre la pauvreté.
Il n’aura échappé à aucun analyste de bonne foi que depuis son entrée dans la vie politique le président Rajoelina est entièrement investi dans le développement et le redressement de son pays. En deux passages à la tête de l’État (la transition et aujourd’hui), il aura apporté la preuve de son patriotisme qui fait que sa candidature à la prochaine élection présidentielle est une chance pour Madagascar.
Au Niger, au Cameroun, à Madagascar et ailleurs sur le continent, le vrai débat ne doit pas porter sur la double nationalité, mais sur comment ne pas exclure, sous aucun prétexte, de la compétition politique des citoyens dévoués pour l’intérêt national et le bien-être du peuple.