Gédéon, auteur-compositeur, artiste chanteur musicien : « Mes œuvres résistent à l’usure du temps »

Gédéon, auteur-compositeur, artiste-chanteur musicien. (Ph: Julien Monsan)
Gédéon, auteur-compositeur, artiste-chanteur musicien. (Ph: Julien Monsan)
Gédéon, auteur-compositeur, artiste-chanteur musicien. (Ph: Julien Monsan)

Gédéon, auteur-compositeur, artiste chanteur musicien : « Mes œuvres résistent à l’usure du temps »

Le 09/09/24 à 10:14
modifié 09/09/24 à 10:37
Absent de la scène musicale ivoirienne depuis de longues années, Gédéon qui réside désormais aux États-Unis, est sur les bords de la lagune Ebrié. Il s'est confié à Fraternité Matin.
Cela faisait longtemps qu’on n’avait pas de vos nouvelles. Ou étiez-vous ?

Je vis aux États-Unis depuis de longues années. Vous dites qu’on ne m’entend pas ici, mais je peux vous assurer qu’on m’entend ailleurs. Je suis actuellement en Côte d’Ivoire pour faire le deuil de mon père et de ma mère décédés pendant mon absence.

Quelles est votre actualité musicale ?

Actuellement, je prépare un album que je compte présenter bientôt à mes fans.

Pouvez-vous nous en dire plus ?

Je souhaite garder la surprise. Quand on a passé une longue période hors de son pays, il est préférable de venir avec une œuvre de belle facture pour contenter les fans qui ont dû attendre longtemps. Ce que je puis vous révéler, c’est que c’est un album de huit titres qui sera intitulé « Forever » qui signifie pour toujours. Et la sortie est prévue pour le mois de février 2025.

N’avez-vous pas d’appréhension quant à l’accueil de ce nouvel album ?

Non, pas du tout. Vous savez, lorsqu’on fait des œuvres qui traversent le temps, on n’a pas à avoir des appréhensions. Je m’inscris dans la lignée des artistes qui font des œuvres qui résistent à l’usure du temps. Bien qu’étant absent de la scène musicale ivoirienne depuis un certain temps, il n’en demeure pas moins qu’à chaque grand rendez-vous, comme la fête des mères, pendant la Saint-Valentin et bien d’autres événements, on joue mes titres. Et les mélomanes ne se lassent pas d’écouter mes chansons. C’est dire qu’il y a des œuvres qui résistent à l’usure du temps.

Oui, mais depuis votre absence, il y a d’autres genres musicaux qui ont pignon sur rue, notamment le coupé-décalé, le rap ivoirien etc. Pensez-vous pouvoir faire entendre votre musique malgré l’influence de ces genres musicaux-là ?

Assurément Oui. Lorsqu’on part au marché pour faire ses emplettes, il y a toutes sortes d’articles et chacun les choisit selon ses besoins et ses envies. La diversité des genres musicaux participe du dynamisme du show-business ivoirien. Tout le monde n’est pas friand des mêmes choses. Et la notoriété de certains artistes n’est pas forcément gage de qualité. Je reste persuadé qu’il y a un public pour le genre de musique que je propose.

Vous semblez optimiste, mais avant vous, des artistes de votre génération ont tenté des retours sur la scène musicale, et le public n’a pas été très réceptif. Qu’est-ce qui vous rend si sûr de vous ?

Tout est une question d’organisation et d’encadrement. Un retour sur la scène musicale après une longue période d’absence se prépare en amont. Je ne dis pas que les autres ne l’ont pas fait. Mais, j’ai un staff qui travaille sur mon retour. Et nous préparons les choses avec minutie. C’est toute une stratégie que nous sommes en train de mettre en œuvre pour ce retour-là. J’ai conscience qu’il faut que je propose une œuvre discographique de grande qualité pour non seulement satisfaire mes fans qui ont attendu longtemps, mais également pour accroître le cercle de ceux qui apprécient ma musique.

Dans la nouvelle génération d’artistes qui caracolent au sommet des hit-parades, y a-t-il quelques-uns dont vous appréciez la musique ?

Oui, il y en a beaucoup. Je peux citer pêle-mêle, KS Bloom, Dj Mix, Bebi Philip, Suspect 95 et bien d’autres. Ce sont des artistes qui font la fierté de la musique ivoirienne. Ce sont des jeunes au talent prometteur.

Est-il possible de vous voir collaborer avec ces jeunes-là ?

Ce n’est pas à exclure. Mais pour l’album que je prépare, ce n’est pas le cas. Je reste dans mon registre musical. Le style que je fais peut être apprécié par tout le monde. Autant par les anciens que par les plus jeunes. Il ne s’agit pas de faire une collaboration pour être forcément dans l’air du temps. Il y a des gens qui aiment les chansons qui font danser et d’autres qui aiment les chansons qui font réfléchir, rêver. Chaque genre musical a sa cible et son public.

En tant qu’ancien, avez-vous un conseil à donner aux jeunes chanteurs ?

Un seul. Ce serait de véhiculer des messages pour faire avancer le pays et le continent africain. Il est bien de faire danser mais, l’artiste a aussi pour vocation de contribuer à faire avancer les choses de façon positive.

Aux États-Unis, avez-vous une activité musicale ?

Oui, bien sûr. Je travaille avec des artistes américains. C’est même avec eux que je prépare mon futur album. Je participe à des festivals, des diners gala etc. J’ai une bonne activité musicale qui me permet de faire des tournées, de mieux m’imprégner des réalités musicales américaines et surtout d’ouvrir mes compositions et aller à la rencontre de nouvelles sonorités Soul, Jazz, Pop, Folk. C’est d’ailleurs cette somme d’expériences et de partage culturel que j’ai compilés dans mon nouvel album tout en gardant ma vibre sentimentale et mon engagement en faveur des grandes causes du monde.

Derrière vos allures de «poétique lover» se cache également un artiste engagé, à l’écoute de certaines de vos chansons...

Mon engagement se décline dans les thématiques de paix et de justice dans le monde. Dans chacun de mes albums, il y a toujours eu une composition qui prend position sur les grandes problématiques mondiales telles que le racisme, l’environnement, la déforestation, l’éducation, l’exploitation des richesses et des peuples africains, le respect de nos traditions et valeurs africaines. Je pense qu’un artiste ne doit pas chanter pour simplement chanter. Mais son message doit aller dans le sens du développement et de l’épanouissement de la société et de la communauté. A travers ses compositions, l’artiste doit pouvoir permettre au peuple de s’élever vers l’excellence afin de bâtir un monde meilleur.

Comment votre musique est perçue par le public américain ?

Plutôt bien. Et mon public est de toutes les races et nationalités. Il y a des Africains mais aussi des Américains. Il y a des Blancs et des Noirs. La musique n’a pas de frontières. Il suffit qu’elle soit bonne pour que n’importe quel type de public y adhère.

Parlez-nous un peu de vos débuts dans la musique ?

Ça date de l’adolescence. Élève déjà, comme tous les jeunes de ma génération, je faisais de la musique qu’on appelait «ambiance facile». Et mon père était prédicateur protestant, donc je chantais dans la chorale de l’église. Des années plus tard, j’ai fait la rencontre de Thomas Brochard, un Occidental qui m’a appris à jouer la guitare. Par la suite, j’ai joué dans les pianos bar pour peaufiner mon art. Et c’est dans l’un de ces établissements de nuit qu’un soir, j’ai fait la rencontre d’un avocat hollandais de passage à Abidjan qui a apprécié ce que je faisais et a décidé de produire mon premier album intitulé «La Rose». C’est ainsi que j’ai enregistré mes fameux titres «J’aime la Rose» et «Saint Valentin», arrangés par feu N’guessan Santa. Et en mai 1996, quand l’album est sorti, le succès a été immédiat. Quatre ans après, j’ai sorti «Racine carrée de moi c’est toi» dans lequel il y a la chanson «Maman» qui a également connu un franc succès. Il y a eu aussi «Ayela» et «Si je m’en allais» etc., de mon dernier album en date «Soleil Nouveau». Chaque fois, le public a apprécié. Voilà résumé ma carrière musicale.

La pop musique que vous pratiquez est assez peu connue ici. Pourquoi avoir opté pour ce genre musical ?

Ce n’est pas un choix en tant que tel. C’est venu naturellement à moi. Vous savez, en général, lorsqu’on joue à la guitare, on est enclin à un genre de musique un peu plus posé. L’instrument nous influence. Et moi, la guitare m’a conduit vers la pop musique de tendance Folk song.

Quel regard portez-vous sur l’évolution du show-business ivoirien ?

La musique ivoirienne se porte assez bien. Les choses avancent à grands pas. Il y a une effervescence qui fait plaisir. Partout, on écoute la musique ivoirienne. La chanson Coup de marteau, par exemple, sortie à la faveur de la Coupe d’Afrique des nations a eu un écho partout dans le monde.

Quand vous quittiez le pays, il était en crise. Qu’avez-vous constaté à votre retour ?

Je pense qu’il y a des souvenirs qu’il ne faut pas ressasser. De ce qui m’a été donné de voir, je pense que la situation est beaucoup plus apaisée. Vous savez, je pense qu’on devrait remplacer l’expression réconciliation par celui de conciliation.

Il faut poser les jalons de la conciliation pour ne pas avoir à parler de réconciliation en mettant en avant les alliances interethniques, les parentés à plaisanterie qu’on appelle «toukpê». Si j’ai un appel à lancer, ce serait que les Ivoiriens gagneraient à être ensemble. C’est unis qu’on peut se développer. Il faut qu’on puisse se mettre ensemble, taire nos différences lorsqu’il s’agit de l’intérêt supérieur de la nation

Interview réalisée par


Le 09/09/24 à 10:14
modifié 09/09/24 à 10:37