On a retrouvé le ‘‘sapeur’’-chanteur Beny Bezy

On a retrouvé le ‘‘sapeur’’-chanteur Beny Bezy

Portrait: On a retrouvé le ‘‘sapeur’’ - chanteur Beny Bezy

Le rendez-vous est à la frontière des 11 et 12e arrondissement de Paris, à Nation. Dans un restaurant éponyme que le chanteur a regagné par le Rer A en provenance de Fontenay sous-bois. Il habite cette commune située dans la banlieue de la petite couronne de Paris en région Île-de-France avec sa femme Kini et leurs 5 enfants quand ces derniers sont en vacances.

Pas besoin de chercher longtemps. L’homme n’a rien perdu de ses habitudes vestimentaires. Assis à une table de terrasse du Café Nation, une écharpe prince de Galles, lui cerne le cou et descend le long de sa poitrine sur un costume, non pas à 10000 euros (6,5 millions) comme François Fillon qui alimente les conversations, mais 10% moins onéreux. 1000 euros soit 650000f de nos francs. Quand même. Il est gris pétrole. Sa chemise blanche est une smuggler.

Sa cravate est assortie à sa chaussure Camel, une couleur à priori casse gueule mais que lui porte correctement. C’est qu’il a choisi le bon camel, une couleur chaude, mais sans la moindre teinte de flamme (orange, ocre and co). Sa chaussure est une John Lobb, marque anglaise spécialisée dans les chaussures de luxe. L’homme tient à être bien mis et cela date de ses années à succès. Dans les années 80, les artistes saisonniers vivant en France, avaient l’habitude de venir en Côte d’Ivoire pendant l’été, les vacances scolaires, faire systématiquement la promotion de leurs albums. Beny Bezy en faisait partie aux côtés de Bel Batista, Wedji Ped pour n’en citer que deux.

Mais il se distinguait par sa volonté d’être bien mis, tiré à quatre épingles. Qu’il pleuve ou qu’il neige. Ou que la canicule dise son discours de chauffage. Sous les tropiques donc tout y passait au mépris du temps : blousons cuirs, cheveux gominés, santiags, écharpes etc.

Une sorte de sapeurs qui rappellent mais que trop furtivement les Congolais, parce que cette audace vestimentaire de l’Ivoirien se prive elle, d’extravagance. Au point que le 18 octobre 2013, après quelques années de silence, la célébration  ses 35 ans de musique s’est faite sous la dénomination de  « La nuit de l’élégance ». De 22h à l’aube avec des artistes comme, Gadji Céli, John Djongoss, Rose Bah, Mahely, Nahounou Paulin, Luckson Padaud, Justin Satanislas à l’espace Noisy le sec. Ça été l’occasion de visiter les titres de son album le dernier de l’époque intitulé ‘‘Veto’’. Et les anciens hits qu’il enchainait chaque année.

Beaucoup parler déshydrate. Les boissons sont alors portées à la bouche, qu’une couronne de deux jours cercle. Blanche est la couronne et le sexagénaire parle avec une pointe de nostalgie. Il évoque ses années lycée en qualité de guitariste avec comme chanteur Paul Dodo (ce dernier nous a quittés le 1er juin 2016). Puis à 21 ans, c’est le départ pour la France sur conseil de son frère ainé qui lui aurait inculqué ce goût des soins vestimentaires.


Assurance, droit, taxi, présidence

Il y étudie le droit puis l’assurance avant de travailler pendant 10 ans à la Préservatrice Foncière, une grande Société d'Assurance basée à la défense, le quartier le plus cher d’Europe. Il y aiguise, au contact de bourgeois, et du beau monde, sa propension à la sape. Toute chose qui séduit Krasso Christophe un producteur qui compte sur ce look, le jeu de guitare, l’aisance sur scène de ce jeune homme qui interprète Otis Reeding, James Brown, les Beattles, les Rollings stones, pour booster sa carrière.

Le 45 t qui sort, n’affiche pas l’image de Beny Bezy qui s’oppose à ce qu’il considère comme une surexposition. Parti au pays, il n’y passe cependant pas inaperçu et se fait sensible à la magie des bains de foule. A son retour le jeune homme de 28 ans enregistre avec les arrangements de Wedji Ped, ‘‘Djilimou’’ dont les droits d’auteur, de même que l’accueil du public étonne agréablement le chanteur. Désormais en confiance, il enchaîne des productions telles que ‘’Dinigbeu’’ (1981), ‘’Zigléga’’ (1982). Ensuite suivront ‘’Démocratie’’ (1983), ‘’Amlouni’’ (1984) et ‘‘Belle amie’’ (1985).

C’est avec cet album qu’il débarque en Côte d’Ivoire en 1986 et fait une tournée à Bouaké, Gagnoa, Korhogo où il est reçu par la famille Gbon qui fait montre de ses largesses. Il se produit également à Abidjan, au stade Champroux de Marcory. Il fait même trois fois l’Hôtel Ivoire. Puis il faut attendre 1992 avec un album baptisé ‘’Macao’’ pour réécouter Beny Bezy. L’artiste était parti faire un tour aux Antilles, puis un détour à New York où il exerce comme chauffeur de taxi. Là-bas, il enregistre ‘’Globéhi sexy’’ en 1997. Il vivra pendant 7 ans aux Etats-Unis finalement.

En 1999, la mère de l’artiste meurt. Il revient au pays pour son inhumation. Meurtri, il ne compose plus. Les mélodies et les hits le fuient. Il sort néanmoins en 2004 ‘’La famille’’. La période est mal choisie. La côte d’Ivoire vit une crise et cet album passe inaperçu. Il est très déçu et affecté et cela porte à deux les coups durs qui l’ont marqué.


Ses enfants : la relève

Le premier étant le mauvais traitement infligé par ses compatriotes lorsqu’il était président des artistes musiciens de Côte d'Ivoire en Europe. En 2013, il sort ‘‘veto’’ puis ‘‘La renaissance’’ en 2015.

Le passage d’anciens comme Justin Stanislas le 21 décembre 2014 à l’Espace l’Acoustic aux Deux-Plateaux-Vallon donne des raisons à Beny Bezy de croire qu’un artiste ne part pas à la retraite, même si ses enfants Doriane et Taylor notamment ont décidé d’embrasser la carrière de musicien.

Johnny Halliday, Manu Dibango ou Charles Aznavour lequel entame une nouvelle tournée en avril 2017, sont une brûlante illustration. « Colore ma vie » semble entendre puis dire Beny Bezy en écho à l’album cuvée 2017, d’Aznavour dont c’est d’ailleurs le titre.


ALEX KIPRE

Envoyé spécial à Paris