Alpha Blondy (Artiste-chanteur): ''La réconciliation nationale n’est pas de l’ordre de l’utopie…''

Alpha Blondy (Artiste-chanteur): ''La réconciliation nationale n’est pas de l’ordre de l’utopie…''

En baptisant votre dernier album « Human Race » et en affirmant que vous n’êtes pas un humano-pessimiste, l’on peut se dire qu’à un moment de votre vie, l’humanité vous a déçu ?

La race humaine, est la plus belle race de l'univers, parce qu'elle est à l'image de Dieu, le Créateur. Le but recherché dans cet album, c'est de dire que nous sommes 7 milliards 500 millions d'hommes sur cette terre et que nous passons notre temps à parler des méfaits d'une minorité. Je vais un peu exagérer. Supposons qu'il y a un milliard de salauds. Je pense qu'il ne faut pas que le milliard de salauds nous empêche de savourer les 6 milliards 500 millions de gens épris de paix et de partage qui nous entourent et qui nous donnent de l'amour. Parce que nous sommes majoritaires. J'ai décidé, à mon niveau, de m'intéresser aux 6 milliards 500 millions qui me donnent de l'amour, qui me donnent du plaisir.

L’amour, ce sentiment et cette posture que les religions ont en commun, vous ont, très souvent, conduit à célébrer une sorte d’œcuménisme. Affichant votre appartenance à l’Islam avec votre récent pèlerinage à La Mecque, êtes-vous toujours le chantre du dialogue des religions ?

Il faut déjà savoir que Koné Seydou avant Alpha Blondy, est né musulman, dans une famille musulmane. Je l’ai toujours été. Donc il était impérieux que je fasse le Hadj à La Mecque. La religion est un phénomène universel. Tous les peuples de la Terre ont, à un moment où l’autre de leur histoire, fait appel à la religion pour expliquer la présence des hommes sur la Terre. La Science est l’autre moyen qu’ont trouvé les hommes pour expliquer leurs origines. Il y a dans le monde trois grandes religions qui n’ont qu’un seul Dieu : le judaïsme, le christianisme et l’islam. Justement, très bientôt, j’irai en pèlerinage en Israël, à Jérusalem. J’irai me recueillir à l’Église du Saint-Sépulcre, au Mur des lamentations, au dôme du Rocher et la mosquée Al-Aqsa, ce lieu qui représente le troisième site le plus sacré de l’islam, tandis que, dans le judaïsme, il est considéré comme le plus important lieu-saint. Toute chose qui est en conformité avec « Human Race », un titre pour réconcilier les populations entre elles. C'est un hommage à la grande famille de la race humaine.

Ce discours qui se veut fort optimiste, tient-il aussi, pour les politiciens ? Nourrissez-vous ce même sentiment d’une société pacifiée, réconciliée, pour votre pays, la Côte d’Ivoire ?

Les politiciens ont failli à un moment. L’erreur est humaine. C’est persévérer qui est diabolique, inhumain, qui viole l’Adn de l’Homme, et je ne pense pas qu’ils le soient, nos politiciens ! Il ne faut pas leur faire des procès d’intention. Les politiciens sont un mal nécessaire. A nous de savoir les critiquer, bon gré mal gré ! Optimiste de nature, je dis qu'il faut que les armes se taisent. On y est arrivé, mais le brouhaha politique continue. Cela dit, tant que les hommes se parlent, ça va. Le Président Alassane Ouattara vient de poser un acte politiquement courageux en décrétant cette amnistie générale pour tous les prisonniers politiques, y compris pour Mme Simone Gbagbo. J'ai trouvé que c'était une bonne décision et je le lui ai dit. Cette décision a soulagé le climat politique, qui était un peu trop tendu. Pour moi, la réconciliation nationale n'est plus de l'ordre de l'utopie. Encore, faut-il que tous et chacun fassent preuve d’humilité.

Œcuménique dans la foi, vous semblez, tout aussi, éclectique ou plutôt en quête de fusion dans votre reggae. Avec, nous semble-t-il, une nostalgie permanente pour la période Pop et Folk des années 60/70 ?

Vous savez, c’est la pop, le rock, le folk, yéyé, en tant que musiques et mouvement sociaux universels qui ont bercé notre adolescence, notre jeunesse. Avec pour philosophie, celle du mouvement hippie dont le slogan était : « Vivre sans temps mort et jouir sans entraves ».  Et Alpha Blondy l’assume ! J’avais déjà repris « Wish you were here » de Pink Floyd. Sur « Human Race »,  je chante « Je suis venu te dire que je m’en vais » de Serge Gainsbourg. La chanson-phare de mon dernier album n’est autre que « Whole lotta love » de Led Zeppelin, en version reggae. Pour dire que je demeure dans la position de conscience sociale critique avec la philosophie reggae, pour dénoncer les tares de la société, les inégalités, les injustices. Un empêcheur de tourner en rond…  Par ailleurs, comme je l’ai toujours fait depuis des années, je partage aussi des duos avec des  artistes inspirés tels que de Youssou N’Dour, Fally Ipupa et Angélique Kidjo sur ce nouvel album.

Interview réalisée par
REMI COULIBALY